16 septembre 2013
Sublime Lucia

Il est certaines et de très rares soirées où l’on a l’impression que le temps s’arrête et que quelque chose qui échappe à tous- artistes comme spectateurs- s’impose sur la scène; une émotion, une grâce absolue, un abandon total qui nous fait oublier que nous sommes mortels et que notre voiture est mal garée… Pour cette rentrée 2013, à l’Opéra Bastille où l’on ne peut pas dire que le public soit particulièrement enclin aux vivats, c’est toute la salle qui dut se rendre à l’évidence que nous étions en train d’assister à un moment unique en écoutant Patrizia Ciofi dans Lucia di Lammermoor. Très attendue après notre Natalie Dessay nationale qui avait chanté le rôle de Lucia en 2006 lors de la création de cette production mise en scène par Andrei Serban, la soprano rousse, née à Sienne, a littéralement ébloui le public par sa voix d’une virtuosité à vous donner des frissons. Dès le premier acte, apparaissant dans un très beau tableau de gymnase et s’élevant dans les airs sur sa balançoire, on sentait la salle frémir de plaisir à entendre la soprano, accompagnée par ailleurs d’une belle distribution dont Vittorio Grigolo en Edgardo, dans ce monument de Bel Canto écrit par Donizzeti en 1835, archétype de l’opéra romantique italien. Aussi, lorsque le célèbre air « Il dolce suono » débute où Lucia, sacrifiée par son frère et condamnée à trahir l’homme auquel elle s’est promise, perd la raison, chacun retint sa respiration, plongeant toute la salle dans un silence rarissime et une qualité d’écoute miraculeuse. Laquelle ne fut interrompue que par un tonnerre d’applaudissements et bientôt une standing ovation, comme si les corps de chacun des spectateurs ne pouvaient se retenir de rendre ce qu’ils venaient de recevoir, et rompre cette extase dans laquelle ce grand moment d’opéra les avait plongés. Voilà qui devrait se savoir et rendre très délicat la recherche de places de dernières minutes d’autant qu’une autre Lucia est également prévue en alternance… Alors bonne chance…

LM

Lucia di Lammermoor de Donizetti à l’Opéra Bastille jusqu’au 9 octobre

Articles similaires