12 novembre 2016
NKM, apôtre de la modernité?

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Qu’on se le dise, Nathalie Kosciusko-Morizet est l’avenir de la France ! Et les militants réunis salle Wagram en ce mercredi 9 novembre semblent d’accord avec elle ! Malgré les mauvais sondages, malgré les obstacles, malgré la volonté de lui barrer la route, elle tient bon, elle tient le cap, elle décoiffe, elle propose, elle invente, elle dépoussière. Et tous ses talents reposent sur une seule logique : être une femme c’est moderne !

Talons de 12 vs. cravates

Du beau, du neuf, casser les codes, réinventer et réenchanter la politique, redonner du crédit à la parole de nos dirigeants, assumer ses valeurs, ringardiser toute idéologie trop stricte, être franchement et sans honte libérale, bref mettre à la retraite tous les élus et politiciens de plus de 50 balais et se partager le gros gâteau du pouvoir entre jeunes ! En un mot, être actuelle ! Dans cette primaire de droite nous étions persuadés que la modernité – beau concept de communiquant – était l’apanage de Bruno Le Maire. A gauche, nous étions persuadés qu’elle était la propriété d’Emmanuel Macron. Et bien quelle erreur ! La modernité, c’est NKM ! Elle seule porte des propositions réformatrices – retraite à points, statut du travailleur indépendant, réforme fiscale –, elle seule propose à la société de prendre un grand bol d’air frais ! Elle veut une France qui respire, une jeunesse qui s’engage et qui choisit de ne pas de fuir à l’étranger. Elle célèbre la technologie, le numérique, les nouveaux modes de pensées et de vie. Et puis elle est femme. Et par essence et calcul politique elle est donc moderne. Evidemment ! Evidemment ! La modernité est une arme pas un choix ! Les conservatismes de droite et de gauche, les costumes grisonnants, les postures de ses six adversaires masculins, allez hop au placard ! Vive la France de demain ! Elle n’en a pas peur contrairement à eux. Eux, ces vieux, ces hommes déprimants qui veulent que rien ne bouge ou que tout redevienne comme avant.

Le genre suffit-il ?

Alors oui certes il est plutôt bon voire même salutaire que notre classe politique se renouvelle et que des femmes avec leur expérience, leur vision de la vie et du quotidien, leur compétence puissent accéder à de hautes fonctions, puissent avoir des postes à responsabilité et ne plus seulement être cantonnées dans des sous-secrétariats d’Etat à la famille, à l’éducation scolaire ou à la petite enfance ! Et nous ne pouvons que lui donner raison lorsqu’on regarde la France, la composition de l’Assemblée Nationale ou du Sénat. 25 ans après Edith Cresson quelle place pour les femmes ? Alors NKM présidente ? Elle en a les capacités et sans aucun doute l’ambition mais elle devra revoir sa copie et surtout diversifier ses arguments. Elle aura l’obligation de dépasser son genre, car non être femme ne suffit pas pour être compétente ni être moderne. Christine Boutin est-elle moderne ? Martine Aubry représente-elle l’avenir ? Il n’y a ici aucun procès d’intention mais simplement une interrogation. L’incompétence n’a que faire des questions de sexe biologique. Ce que nous attendons, nous citoyennes et citoyens ce ne sont pas des postures, des belles images et de beaux slogans bien calibrés par des équipes de communication ! Non, nous attendons du fond et pour ce qui est du fond la demi-heure de discours dont elle a régalé son auditoire en a sens doute laissé un certain nombre sur leur faim. Pas beaucoup, bien sûr, puisque à priori la majorité de ceux présents au meeting lui sont favorables. Mais les autres, ceux qui sont venus piocher, écouter, se renseigner, se faire une idée dans leur futur choix auront sans doute eu plus de mal à cerner ce que NKM propose vraiment.

L’ombre de la colère

Un seul exemple apparaît comme révélateur d’une candidature et d’une campagne franchement hors-sol. En ce jour anniversaire de la mort du Général de Gaulle, ce n’était pas le grand Charles – auquel tous se réfèrent, parfois même sans vergogne – dont l’ombre flottait salle Wagram mais bien celle d’un Donald Trump à la crinière orangée élu la veille à la présidence des Etats-Unis d’Amérique. Le devoir de tout responsable politique est de répondre aux angoisses et aux incertitudes de ses concitoyens. La réponse formulée par NKM et ses chauffeurs de salle – élus de Paris, députés et sénateurs, à la file, célébrant à chaque fois sa modernité et son courage – est assez inquiétante. La victoire de Trump n’est pas la victoire d’un choix politique mais bien la victoire d’une colère immense. Elle n’est que l’expression d’une frustration, d’un sentiment de déclassement, d’une errance sociale. Certes, il doit bien évidemment y avoir de cela mais choisir de définir la victoire du magnat de l’immobilier et de la téléréalité comme un simple cri de colère et de rejet est une grave erreur ! Une erreur qui pourrait couter cher ici en France. Car après avoir balayé d’un revers de main ce soubresaut de l’histoire politique américaine, NKM s’est engouffrée dans la brèche du danger populiste et du danger lepéniste. Et sa conclusion franchement faiblarde a consisté à revendiquer le front républicain et le combat intégral contre le Front National. Sans jamais vouloir tenter de comprendre. Sans jamais accepter que des Françaises et des Français votent pour Marine Le Pen parce qu’ils adhèrent à son discours et à ses réponses politiques et que non, ce n’est pas seulement l’ombre de la colère qui s’exprime. Mais un autre sujet est déjà sur la table. Pourquoi rassurer l’auditoire, la droite va triompher.

Une dernière question tout de même, quelles sont les différences entre un électeur de Pennsylvanie ou du Wisconsin qui a le sentiment d’être déclassé et un électeur de la Creuse ou d’un ancien bassin minier qui n’a aucun espoir pour l’avenir de ses enfants ? Sans doute faut-il que nous nous interrogions nous-mêmes sur les risques futurs. Mais pas là, pas maintenant, pas ce soir. A vrai dire ce n’est pas vraiment moderne que de vouloir réfléchir !

Par Ghislain Graziani

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