20 décembre 2011

Bien plus qu’un choix, faire du vélo est une attitude. Même juchée sur votre lourd Vélib’, soyez au cœur de la ville un symbole de légèreté et d’élégance. Cheveux au vent, menton en l’air, cuissot tendu, quelque chose d’équestre doit émaner de vous, quels que soient l’état du trafic, de vos pneus ou la couleur du ciel.
Se tenir droit, assurer, s’imposer même, surtout quand un semi remorque vous frôle place de la Concorde. Ne pas renoncer à mettre des talons hauts : en appuyant sur la pédale avec la partie avant du pied, on avance ! Pour les jupes droites, certes, c’est plus compliqué. Eviter de se presser, ça donne chaud. Une allure régulière, un bon déodorant, et vous êtes assurée d’arriver pimpante à bon port.
Ménager son souffle. Dans l’avenue du président Wilson qui monte doucement vers le palais du Tokyo, on peut tenter la danseuse. Mais pour grimper à Belleville, moi, je descends de ma monture. Dans tous les cas, vous l’avez forcément remarqué, c’est la loi du lièvre et de la tortue : le vélo reste, à Paris comme dans la campagne poitevine, le moyen de transport le plus rapide et le plus agréable.
Un cycliste ne jure jamais. C’est pourquoi on ne le confond ni avec un chauffeur de taxi, ni avec automobiliste, ni un cyclomotoriste. En cas de manquement grave de la part de l’une de ces trois catégories, l’injonction « Assassin ! » peut être efficace. Ce n’est pas une insulte, c’est un constat. Insulter est puni d’amende par le code pénal. Il m’est arrivé d’exiger – en vain ! – des excuses après une remarque sexiste d’un camionneur. Je ne renouvellerai pas l’expérience, la vie est trop courte.
Je rêve du jour où les cyclistes se salueront en se croisant le matin et s’arrêteront pour prêter main forte en cas de panne – ce qui arrive encore trop rarement. Ils doivent pour cela s’inspirer du sens de l’entraide et de la sécurité des motards qui, je l’ai remarqué, ont de biens meilleures manières que les automobilistes.
Cela dit, il ne faut jamais désespérer de son prochain. Soyons francs :  il arrive souvent que l’on vous laisse la priorité pour virer à gauche, pour peu que vous ayez levé à temps un bras souple orné d’une main délicate. Dans ce cas-là, toujours remercier l’automobiliste prévenant d’un large sourire et d’un « merci » murmuré, les yeux dans yeux – mais en prenant garde qu’un quidam moins attentionné ne débouche de la file voisine.
La police ? Etre toujours aimable avec la police. S’arrêter, saluer et surtout ne pas discuter. D’autant que bon, reconnaissez-le, le feu que vous venez de dépasser n’était pas tout à fait vert et que bon, oui, c’est vrai, vous venez de faire 50 mètres en sens interdit. Même si, oui bien sûr, vous faisiez attention, la rue était déserte, vous rouliez au pas sur le côté.
Abstenez-vous de toutes ces excuses qui n’en sont pas au regard du code de la route. Acquiescez aux remarques de l’agent. « C’est pour vous, on ramasse des cyclistes tous les jours », dit-il. Et il a raison, n’est-il pas?
En ce qui me concerne, avec un « bonjour bonsoir » poli, un « Eh non, je n’ai rien à dire pour ma défense » ou un  « Je n’ai pas eu l’impression d’avoir eu un comportement dangereux, mais bien sûr, vous avez raison », je m’en suis toujours bien sortie.
A bicyclette dans la capitale,  les moments de bonheur fugaces sont aussi fréquents que précieux.
Dégriser le long d’allées arborées en revenant d’une fête arrosée dans le XIIIe. Traverser, quand l’aube blanchit, la cour carrée du Louvre à la manière d’une duchesse en calèche. Rire sous la pluie au milieu des feuilles mortes sur la piste qui relie Alma Marceau à la Concorde. Franchir la Seine par un matin de printemps. S’arrêter sur un banc pont des Arts. Repartir le cœur léger. Apercevoir le fronton de l’Opéra en traversant l’avenue éponyme à 07h00 du matin. Ou à midi. Ou à 22h30.  Les reflets des colonnes de marbre ne sont jamais les mêmes…
A Paris à vélo, la petite reine, c’est vous !   

Par Dora Barret

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