6 juin 2013
Moustaki/ L’élégant dilettante

Georges Moustaki avait un rapport unique au temps; refusant de le « vendre », il revendiquait  la « paresse idéologique ». Prendre son temps en toutes choses, et ainsi exprimer sa liberté face à l’accélération ambiante. En lui rendant hommage quinze jours après tout le monde, JimlePariser suit ce précepte, avec ce bonheur qu’il y a d’être décalé et dont la presse est bien peu coutumière, a fortiori Internet. En dilettante, ce qui veut dire au sens littéral du terme « celui qui se délecte », devenu depuis un mot péjoratif lié à l’amateurisme et le manque d’engagement… De plus entre le Festival de Cannes et notre arrivée sur le papier dans le magazine Fusac de ce mois-ci, les journées ont été peu à la contemplation… « L’homme descend du songe ». Georges Moustaki  -« celui qui a du poil sur la figure »  définition esquimaude du mot moustaki, de son vrai nom Guiseppe Mustacchi-  aimait beaucoup cette phrase d’Antoine Blondin. L’écrivain-journaliste, spécialiste du Tour de France (et de ses notes de bistros qu’il appelait poétiquement « verres de contact ») partageait en outre avec le chanteur cette passion pour la chose humaine, et à la clé pour le chanteur, une proximité jamais démentie avec son public. Né juif dans un pays musulman, l’Egypte, avec des parents grecs, Moustaki devait son prénom de scène à Georges Brassens qui avait pris sous son aile le jeune homme de 20 ans à son arrivée à Paris. « Gueule de métèque, de juif errant, de pâtre grec », il avait alors composé pour les plus grands de l’époque: Piaf,  à laquelle il avait offert Milord et disait d’elle après leur année de passion- » elle avait creusé sa route sur une terre aride où rien d’éternel ne pousse »- mais aussi Barbara, La longue dame brune, Montand ou encore Reggiani avec l’une de ses plus belles chansons, Ma liberté.  Cette liberté qu’il acceptait régulièrement de mettre à mal avec de « belles geôlières », adepte de la sieste orientale et de la séduction qui va avec… Alors bien sûr, ses chansons demeurent mais avec sa mort, c’est une fraîcheur de pensée et une élégance face à la vie qui disparaît et que les Patrick Bruel, Vanessa Paradis, et autres artistes-marchands du temple ne risquent pas aujourd’hui de remplacer…

Par Laetitia Monsacré

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