31 mai 2014
A Bastille, une Traviata « noir lumière »

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O joie! Tel est le dernier mot prononcé dans La Traviata– la dévoyée- par celle-ci, avant de mourir. Le rideau noir se ferme, puis Diana Damrau/Violetta réapparait, tout de blanc vêtue, ne pouvant retenir un saut de joie sous les vivats de l’Opéra Bastille où elle chante pour la première fois cette amoureuse phtisique qu’elle a déjà brillamment incarné à Bilbao, New York et Milan. Dans un décor minimaliste, des lumières en clair-obscur, un choeur tout de noir vêtu, une Annima à la peau également noire, elle est sans nul doute l’éblouissement de cette nouvelle production très attendue dont le cinéaste Benoit Jacquot signe la mise en scène. « Il y a cent ans, on devait donner la même chose », les commentaires se font acerbes- il est vrai devant une scénographie très classique avec un lit à baldaquin pour seul décor puis au second acte, un arbre et un escalier monumental, et pour seule « folie », les jeunes bohémiennes jouées par des hommes travestis exécutant une chorégraphie assez malheureuse. Bref, la prise de risque est quasi nulle avec un désir apparent de satisfaire le public qui, en cette fin de saison est surtout constitué de riches touristes.

Un plateau vocal de premier ordre

Voilà de quoi toutefois ravir leurs oreilles avec Ludovic Tezier dans le rôle du père d’Alfredo tout simplement magistral et un orchestre s’arrangeant de la direction de Daniel Oren, quelque peu « illuminé »selon certains musiciens, mais particulièrement attentif à ses solistes comme avec Alfredo/ Francesco Demuro au second acte; il est alors à lui seul un spectacle, souvent plus éclairé que la scène…A croire qu’en ce jour d’ouverture du musée consacré à Pierre Soulage à Rodez, son « noir lumière » a fait des émules jusqu’à Paris, tandis que les robes noires du choeur ont une résonnance certaine avec celle portée par Guillaume Gallienne dans Lucrèce Borgia, actuellement à la Comédie Française. « Adieu au passé, aux beaux rêves riants, les roses de mon visage sont désormais fanées », la soprano colorature allemande virtuose, dont la vocation est née devant ce même opéra découvert dans sa jeunesse à la télévision , offre un troisième acte poignant, sa voix donnant à l’agonie de Violetta toutes les couleurs imaginables tout comme dans les vocalises du premier acte avec le célèbre Follie! Delirio vano è questo ou cet Amami quant’io t’amo (Aime moi autant que je t’aime-second acte) à vous donner des frissons. Un vrai régal qui vaut à lui seul toute la soirée…

LM

La Traviata de Verdi à l’Opéra Bastille jusqu’au 20 juin- Il ne reste plus de places que le 2 juin à 180 et 150 euros; à voir aussi dans les salles UGC en direct le 17 juin à 19h30, 28 euros

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