Venus et Adonis, tout premier opéra anglais, créé par John Blow, le maître du célèbre Purcell et compositeur anglais le plus prestigieux de son temps est sans conteste le petit bijou baroque de cette fin d’année. Les décors entièrement éclairés à la bougie de Louise Moaty offre un écrin ô combien réussi aux amours malheureuses de la déesse et du jeune chasseur – et mortel – Adonis. Dix-huit musiciens accompagnent le livret avec des instruments anciens -violes de gambe, théorbe, etc., cette oeuvre rarement jouée qui a donné naissance à un autre chef-d’oeuvre, « Didon et Enée » d’Henry Purcell. Sur la scène, les costumes d’Alain Blanchot, la lumière des photophores, les scènes de chasse avec de vrais chiens ou les colombes transportent le spectateur dans un univers de conte magnifiquement servi par l’orchestre disposé dans la fosse en version musique de chambre, avec à sa tête et au clavecin, Bertrand Cuiller. Céline Sheen en Vénus, Marc Mauillon-Adonis et le jeune Romain Delalande dans le rôle de Cupidon furent également parfaits.
Un opéra à usage privé pour Charles II
John Blow, dévoué au genre sacré, avait composé cet unique opéra pour le roi Charles II, en 1683, destinée à un usage privé, avec force d’ allusions à la vie dissolue du monarque. Ainsi dans le prologue, Cupidon affirme- t’il ne voir « à la cour (…) fidélité et sincérité qu’en un seul vieux lord ou deux, ainsi que chez les sots, les laids et les vieux ». Charles II eut en effet de nombreuses maîtresses et pas moins de 17 enfants … C’est d’ailleurs l’une de ses anciennes amantes, la comédienne Mary Moll Davis, qui tenait le rôle de Venus à la création de l’opéra tandis que celui de Cupidon fut tenu par leur fille illégitime, Lady Mary Tudor, âgée alors de dix ans. Ainsi des merveilleuses voix d’enfants-de la maitrise de Caen où fut créé le spectacle s’élevèrent dans la salle Favart pour une soirée qui ressembla à un songe éveillé…
LM
Venus et Adonis de John Blow à l’Opéra Comique jusqu’au 15 décembre 2012