Il était peu question de personnages heureux dans les films de Philip Seymour Hoffman. Rappelez-vous Happiness, ce film fulgurant sorti en 1997 qui lui avait offert un de ses tous premiers rôles, un pauvre type obsédé sexuel incarnant toute la misère affective du célibataire américain. Un vrai caméléon et un acteur virtuose comme lorsqu’il était devenu Truman Capote, prestation hallucinante de justesse qui lui avait valu un Oscar. Il n’avait pourtant rien d’une star, sans doute son physique de « regular man » et son manque d’ego – le même qui lui permettait de se glisser avec tant d’empathie dans ses personnages – le laissant à distance du maelstrom hollywoodien. Il habitait d’ailleurs à New York, dans le quartier bohème de Greenwich Village, là-même où on l’a retrouvé mort, à 46 ans, d’une overdose d’héroïne – cette drogue qui correspond à l’idée de « Rien à perdre ».
Un dernier film en testament
Son dernier film (sortie encore non fixée en France), The Most Wanted Man, inspiré d’une nouvelle de John Le Carré et montré à Sundance, en avait fait un charismatique espion allemand après que le réalisateur Georges Clooney eut montré une fois encore son talent de composition en pilier de l’organisation d’une élection primaire américaine dans Les Marches de la Gloire. Mais c’est l’an dernier, en leader religieux accompagnant l’ascension de Ron Hubbard, le gourou de l’Eglise de Scientologie dans The Master que l’acteur avait confirmé qu’il était un des seigneurs du cinéma américain. Sans doute était-ce trop lourd à porter; si les démons intérieurs vous offrent un surplus d’âme qui fait la différence face à une caméra, ils peuvent aussi tout broyer sur leur passage. Farewell l’artiste…
LM