« Une danseuse, c’est à la fois un boxeur et une nonne… ». Voilà qui est joliment résumé par Chaplin, même si à voir les pointes de Noëlla, faites sur mesure, dans la loge qui a été reconstituée dans cette belle exposition, on pense plutôt à une poupée. Éléphant Paname persiste et signe sa première place dans l’univers de la danse dans son bel immeuble de la rue Volnay, non loin de l’Opéra Garnier. C’est là que jusqu’au 29 mars, une scénographie particulièrement inspirée met en valeur celle qui fut une étoile au firmament, avec une discrétion aussi grande que son talent. Née la veille de Noël, il y a presque soixante-dix ans, ce « modèle réduit » à la silhouette aujourd’hui encore toute menue et gracieuse, aux grands yeux vert d’eau à la Claude Jade, a ouvert ses tiroirs et ses armoires pour en sortir ses magnifiques tutus de scènes comme celui du Corsaire, La Belle au bois dormant ou Le lac des cygnes, version cygne blanc et cygne noir. Photos d’enfance ou portraits en noir et blanc de Michel Lidvac, pochettes de disques ou romans-photos pour lesquels elle posa dans sa jeunesse, les archives témoignent de l’ascension de cette adolescente qui très vite se retrouva en première ligne, remplaçant au pied levé en 1966 une étoile, alors qu’elle n’était que sujet du corps de ballet. Mais voilà, Noëlla, fille de gardiens d’immeuble, arrivée à la danse grâce à un médecin qui, face à sa maigreur avait eu l’idée de l’inscrire à l’Opéra Garnier, seul endroit où l’on pouvait apprendre gratuitement, était douée, très douée. » Je voulais danser, c’est tout », dit-elle; sans calcul mais prête au sacrifice des heures passées à la barre pour accéder à ce statut d’étoile à 21 ans. Après il y eut Noureev, Atanassoff ou Barychnikov mais aussi une vie de famille avec sa fille franco-japonaise avec laquelle elle dansa même à 50 ans sur la scène de Garnier, faisant les titres de la presse people, toujours avide de ces histoires dynastiques… Laquelle continue avec la troisième génération, sa petite fille, 11 ans, venant d’entrer à l’Ecole de Danse de l’Opéra de Paris à Nanterre. Objets mais également coupures de journaux témoignent de cette carrière où tant d’ adjectifs laudatifs lui furent attribués, « dansant comme elle respire » à l’image de cet extrait vidéo montrant un pas de deux exécuté sur le parvis de l’Opéra Garnier devant des badauds qui doivent s’en souvenir aujourd’hui encore…Toute une époque, qui reste toujours très vivante pour quiconque assiste à un ballet au Palais Garnier, avec ces tutus éblouissants et ces ballerines intemporelles. Car, voilà toute la magie de la danse-résister au temps- et ici, l’occasion d’y retrouver dans cette exposition impeccable, l’univers d’une de ses plus grandes magiciennes.
par April Wheeler
Un livre Noella Pontois Divine Etoile est sorti à l’occasion, à découvrir jusqu’au 29 mars à Elephant Paname