Il arrive qu’une interview vous en donne plus. Qu’à la faire ou la lire, vous vous disiez que vous offrez un moment de vrai journalisme à votre lecteur; qu’il touchera en lisant ces lignes quelquechose de plus essentiel, a fortiori lorsqu’il s’agit du cinéma, cet art où tout est toujours « sous contrôle ». Marie Elizabeth Rouchy, journaliste au Nouvel Observateur a réussi cela avec Anne Fontaine et nous a donné envie de vous offrir la possibilité de lire sa rencontre avec cette réalisatrice qui signe avec Perfect Mothers un très beau film où la force de l’océan rivalise avec celle de la passion qui pousse deux femmes vers deux jeunes « dieux »-leurs fils. Voici la genèse du projet avec ses difficultés et ses coulisses racontées avec franchise et intelligence pour un film au casting international. Enjoy…
Pourquoi avoir souhaité tourner « Perfect Mothers » en anglais ?
J’ai d’abord pensé faire le film en France et en français mais, très vite, j’ai compris que ça ne collait pas. Impossible de transposer l’Eden décrit par Doris Lessing à Biarritz ou à Belle-Ile-en-Mer ; l’histoire devait se dérouler dans un cadre plus grand et d’une beauté plus éclatante. Et impossible, soudain, d’imaginer deux actrices françaises pour véhiculer la sensualité de Lil et Roz, ces deux amies d’enfance qui s’éprennent de leurs fils respectifs. Il y avait aussi le risque, très courant dans notre culture, de trop expliquer les personnages, de les « psychologiser ». Peu à peu, encouragée par Dominique Besnehard, qui est coproducteur de « Perfect Mothers », l’idée de tourner en anglais, une langue plus sensuelle, plus érotique, a fait son chemin.
Qu’est-ce qui vous a décidée à sauter le pas ?
« Coco avant Chanel » avait connu un certain succès aux Etats-Unis. J’ai pensé que si je parvenais à intéresser une actrice américaine à mon projet, je pouvais prendre ce risque. J’ai envoyé le livre de Doris Lessing à Julianne Moore qui s’est montrée enthousiaste. Bien qu’elle ait dû renoncer au projet pour des problèmes de date, les dés étaient jetés.
C’est finalement Naomi Watts et Robin Wright qui interprètent les personnages de Lil et Roz.
J’ai pris contact avec Naomi Watts par l’intermédiaire d’Isabelle Huppert. Naomi savait que j’avais travaillé avec Isabelle, qu’elle connaît très bien. Nous avons déjeuné ensemble et j’ai senti qu’elle allait me faire confiance. J’ai mis plus longtemps à me décider pour Robin Wright, jusque-là presque exclusivement employée dans des rôles de victimes – je ne voulais surtout pas que le personnage de Roz tende vers la mélancolie. D’autres actrices américaines, dont Nicole Kidman, se sont ensuite intéressées au projet. Le casting de « Perfect Mothers » est l’un des plus compliqués que j’ai jamais eu à réaliser : je voulais absolument qu’il y ait une sorte de gémellité dans ce couple.
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