Ce n’était pas la scène de » Chantons sous la pluie« , mais ça nous l’a fortement rappelée… Un vrai clin d’œil à Gene Kelly, avec cette fois dans le rôle principal, Dominique de Villepin ! Et pour remplacer le numéro de claquettes sous la pluie, une visite de marché pour le candidat au mouvement politique de République solidaire; sourire hollywoodien aux lèvres, se passant la main dans les cheveux – à défaut d’avoir un parapluie – avec une classe digne d’un spot pour L’Oréal Men. De quoi susciter des commentaires admiratifs: « J’adore Villepin ! », « Oh ! Qu’il est grand, qu’il est beau ! »que l’on pouvait entendre non pas dans la bouche de midinettes, mais des mémés, bien à l’abri sous leur voile en plastique… Pour sa première sortie de campagne, Domnique de Villepin, a ainsi voulu casser son image »haute bourgeoisie », et aller voir les « vrais gens », comme ceux qui habitent à Charenton. Paisible banlieue, mais banlieue tout de même!
« On est très heureux de le recevoir dans le Val-de-Marne » s’esclaffaient d’ailleurs les jeunes gens de la communication de la région… Mais on pouvait lire l’étonnement chez les habitants. Certains sont allés jusqu’à se demander, qui il était, d’autres, pourquoi il était là ?
Et lui de demander : « Je ne vous dérange pas trop ? » Malgré ses 2% dans les sondages, Dominique de Villepin toujours poli, était là pour montrer qu’il est définitivement « rentré dans la course », et que plus qu’un sprint, il allait l’aborder comme une course d’endurance. Lentement, mais sûrement ? Car quand un journaliste aborde la question des 500 signatures et la solitude qui semble l’entourer, il répond par une autre question : « j’ai l’air d’être seul ? ». Et de vérifier donc tout de suite. Un regard à droite, puis un regard à gauche : un troupeau de journalistes est bien présent. Ses gardes du corps aussi. Mais à part eux…
La méthode Chirac
Une petite photo? Et là un passant de me glisser « ça n’en vaut pas la peine, il ne sera pas élu ! ». Mais Dominique de Villepin ne se laisse pas abattre. S’il n’a pas grand-chose à dire aux commerçants de Charenton, il va tous les voir, un par un. « Bonjour », « Comment allez-vous ? » et le voilà parti dans quelques banalités de courtoisie. Après les fruits et les légumes, le tabac-presse, il s’arrêtera même à la banque, faire un coucou au guichet… Encore pour dire bonjour. Et le voilà qui use de la méthode Chirac, sûrement pour casser son image trop Valery Giscard d’Estaing : en réponse à une bouteille de vin qu’on lui offre, il remercie et confie : « j’ai grandi au poulet et au vin jaune ! » S’il le dit…
Dans les faits, c’est aux journalistes, qu’il se confiera davantage, mais jamais spontanément. Il fait d’abord mine de nous ignorer, puis dès qu’une question arrive, il saute dessus. S’arrête. Marque un silence… Et nous voilà tous tombés dans le piège, à tendre l’oreille. Enfin il parle ! « Les Français souffrent au quotidien. Il faut enrayer cette souffrance : aujourd’hui il y a en France 8 millions de pauvres. » Plus que la dette, et les préoccupations européennes, de Villepin pense à nous, les pauvres. Les vrais gens qui souffrent en silence, au quotidien.
De Villepin, candidat de gauche ??
« Nous sommes un pays qui a des atouts, encore faut-il les exploiter et non se replier sur soi-même. Quand j’entends parler des quotas d’achats pour acheter en France – « pensée simpliste de l’extrême-droite » -, j’ai le sentiment qu’en enlevant aux uns, on donne aux autres. Si la France n’achète plus à l’étranger, la Chine répondra… Et dès lors, à qui vendrons-nous le luxe ? » Ah non, pardon, de Villepin est bien candidat de droite !Le voilà parti dans un discours, tribun improvisé des trétaux. « Une autre France est possible ! Il faut éviter la démagogie et l’électoralisme qui envahissent cette campagne ! J’ai été patient. J’ai bien réfléchi. Et je veux défendre la France, la sortir de la tourmente, la remettre sur les rails. La France est un grand pays, et c’est pour cela qu’il faut prendre les mesures qui s’imposent, mais les prendre maintenant ! Après seulement, la campagne se reconcentrera » Là, on l’avoue, il nous perd. Des regards hagards se croisent. Il voudrait donc se mettre d’accord avec Sarkozy, pour ensuite faire sa campagne ? « Il y a un état d’urgence où l’ensemble des forces économiques doivent se rassembler. Il faut créer une règle constitutionnelle qui vienne à la fois de la droite, de la gauche et du centre ». La voilà la solution de Villepin : réunir tous les partis, faire une règle commune ensemble, puis se battre dans la campagne. Quel optimisme !
Tribun des trétaux
Optimiste certes, mais lucide : « Aujourd’hui nous sommes dans l’indécision car les Français souffrent et sont loin de la cristallisation projetée sur un candidat, où ils peuvent se dire c’est lui, ou c’est elle, le prochain président de la République ».
Son pire scénario ? « Continuer d’avancer dans le noir. » On demande plus de précisions, le pire scénario, ce serait la réélection de Sarkozy ? « Non, mais la fatalité et la résignation »
Je crois que c’est clair, le slogan de campagne de Dominique de Villepin est tout trouvé : » Une autre France est possible! » En d’autres mots, l’espoir, le courage, c’est lui qui l’incarne !
Nous voilà rentrés dans le marché couvert de Charenton. Ouf, la pluie dans sa chevelure soyeuse, c’est bien fini. Et au stand boucherie, une journaliste ne peut s’en empêcher : « vous disiez que Nicolas Sarkozy avait promis de vous pendre à un croc de boucher ? » La malice envahit son visage, cette question, on aurait dit qu’il la désirait, il s’en frotte même les mains avant de répondre : « Les fêtes de fin d’année sont là, et moi aussi, je suis toujours là ! »