20 février 2012
The Berliner- A l’assaut du Bundestag !

Vendredi 3 février, le parti des Pirates (die Piraten) a célébré les 100 jours de son entrée au Parlement du Land de Berlin après avoir totalement déjoué les pronostics lors des élections régionales en septembre 2011. S’inspirant du modèle suédois, né à Berlin en septembre 2006, les Pirates ont séduit grâce à leur incisif slogan « Klarmachen zum Andern! » , c’est-à-dire changer la politique en promouvant la transparence autant que possible.

La transparence, justement, a été au cœur des premières critiques qu’on leur a adressées. En effet, les débuts à l’automne dernier ont été poussifs et remarqués: le choix du président du groupe au Parlement a suscité, en séance plénière, de grandes et bruyantes réactions, les uns accusant les autres de s’être arrangés sans en prévenir le reste du parti. Fraichement élu, un parlementaire -Martin Delius- a oublié de cacher dans un email les 200 destinataires concernés par une candidature en tant qu’assistant. Un autre, Simon Weiss,  a publié une photo de lui sur le Net avec un air ailleurs, potentiellement sous l’emprise de la cocaïne. Et la seule femme parlementaire, Susanne Graf, n’a pas hésité à suggérer que l’on engage son petit ami comme collaborateur!

Car le tonitruant résultat de septembre dernier – 8,9% des suffrages rassemblés – a permis à quinze néophytes de découvrir les arcanes politiques. Parmi ces nouveaux visages, on trouve des étudiants, des informaticiens, des ouvriers… soit quatorze hommes et une seule femme, âgée de 19 ans et tout juste détentrice de son baccalauréat.

Votes contestataires

Dès la première réunion, les Pirates ont compris que les promesses qu’ils avaient faites en campagne seraient intenables. Mais ils se réjouissent autant de leur liberté de ton et d’action qu’ils se ravissent de n’appartenir à aucune machine politique qui, sous la forme d’une coalition, les frustrerait. En réalité, ils ne dépendent d’aucun électorat, car celui qui les a élus est contestataire, donc volatile et errant. Les 8,9% des électeurs les ayant plébiscités n’ont en effet rien attendu de concret de la part des pirates – la moitié d’entre eux avait d’ailleurs justifié leur choix en évoquant un ras-le-bol des partis politiques déjà établis.

Au sein du parti, deux groupes se distinguent aujourd’hui après cent jours passés à l’assemblée: ceux qui veulent rester concentrés sur leurs sujets originels d’une part, et ceux qui souhaitent élargir les compétences et connaissances du parti en offrant des solutions globales, voire un programme politique complet d’autre part. Cette prise de conscience de la nécessité à se présenter comme sérieux sur tous les fronts convainc manifestement puisque, selon une récente étude Forsa, 14% des Berlinois seraient désormais prêts à choisir les Pirates demain.

Auréolé de quinze sièges au parlement de Berlin, scrutant avec intérêt et convoitise les rendez-vous électoraux des Länder de la Sarre (mars 2012, estimations autour de 5%) et du Schleswig-Holstein (mai 2012, autour de 7%), le parti orange surfe sur une tendance qui pourrait le propulser jusqu’au Bundestag à l’automne 2013.

A l’échelon national, les Pirates – aujourd’hui composé de 20 000 flibustiers dans toute l’Allemagne – convaincraient, selon les sondages, entre 4% des votants (institut Allensbach, 25 janvier) et 8% (institut Emnid, 29 janvier). Ils pourraient ipso facto entrer pour la première fois de leur histoire au Bundestag (5% sont nécessaires) et réitérer leur abordage du navire politique allemand. Dans l’état actuel du jeune parti néanmoins, les politologues s’accordent presque tous pour dire que son apport serait moindre, inadapté voire inexistant. Cette simple présence se révélerait pourtant très handicapante pour les socio-démocrates du SPD. Car pour asseoir leur autorité dans l’Assemblée et dans l’optique où ils l’emporteraient en 2013, ils devraient alors composer avec une autre formation que leurs traditionnels alliés Verts… A 18 mois des élections, l’hypothèse d’une victoire de la gauche reste toutefois jugée très peu crédible par de nombreux observateurs car d’aucuns conviendront que l’éparpillement de cet électorat ne peut que favoriser une CDU pourtant bien mal en point.

 

Par Arthur Beckoules

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