16 février 2024
Western, ça décape

C’est l’histoire d’un homme et d’une femme. Aurore, qui avant d’atterrir loin du monde, dans la maison héritée de son père dans les Causses, « a travaillé plus pour gagner la même chose, puis travaillé moins pour aucune différence, (elle) a été normale et cynique, libérale et ratissée, amoureuse, patiente, infidèle, sadique et à nouveau calme, a fait des injections sous la peau, écoute encore Noir Désir sans faire exprès quand ça passe, lit la presse quand ça sonne ». Marie Pourchet a l’écriture scintillante et foudroyante pour son western, « un endroit de l’existence où l’on va jouer sa vie sur une décision, avec ou sans désinvolture, parce qu’il n’y a plus d’autre sens à l’existence que l’arbitraire ». Face à elle, un comédien très connu, Alexis, « habité de ce génie sans traces qu’est la névrose ». Et, histoire de faire dans le triangle amoureux, une jeune actrice, Chloé, forcement amoureuse subjuguée par Alexis à l’issue d’une audition, l’abordant à la fin d’un dîner de la troupe, lorsque « l’assemblée rayonnante devient bruyante » et « quand le passage des graisse cuites et des alcools dans le sang épaissit les haleines et les idées ». Les phrases écrites au couteau s’enchainent et claques, longues ou courtes; « simplement elle prenait désormais l’éternel sentiment du vide pour un compte rendu objectif et satisfait de la réalité ». Alors à la faveur d’un viager, lorsqu’Alexis débarque dans le refuge d’Aurore débute le western où « les hommes arrivent chez les femmes comme chez la mort. Toujours trop vite, en avance. » Vite aussi, le roman attrape son lecteur dans ce récit que certains à la vue courte pourraient qualifier de féministe, « un homme n’est occupé que de sa propre croissance » alors  qu’il en est tout autre. L’auteur est bien trop maligne pour cela, ne laissant place qu’à la force de son récit en route, s’amusant du monde du théâtre où « des folles de Pasolini, toujours à moitié à poil sur le plateau, des exaltées biberonnées à Claudel, jouant pieds nus. Les plus intéressantes restant les asociales qui, d’aucune fête et impuissantes à flirter dans les amphithéâtres, espèrent au gré d’une scène entre Camille et Perdican, la rencontre du trimestre. »  Mais comme on ne voudrait pas avoir à payer des droits d’auteur à Stock à force de citation, on vous laisse découvrir ce roman écrit au couteau, aux personnages à l’opposé du style flamboyant. Voilà qui méritait bien un prix, celui du café de Flore où vous pourrez peut-être croiser Maria Pourchet, invitée à l’année dans ce lieu où certains écrivains en herbe cherchent l’inspiration au premier étage.

LM

Western de Maria Pourchet chez Stock, 20 euros

Articles similaires