20 octobre 2012
Picouly au Paradis

Bon d’accord, ce n’est pas évident d’aller au théâtre à 19 heures. Mais quand vous verrez, après son succès cet été en Avignon,  Daniel Picouly sur la scène du Théâtre Tristan Bernard, vous racontant avec gourmandise ses années d’écolier, cette époque où il voulait tuer son professeur qui avait indirectement insulté sa mère, ses copies avec tellement de fautes d’orthographe qu’on les aurait dit « corrigées avec du mercurochrome », vous aurez cette délicieuse impression de goûter en sa compagnie à ce que l’on nomme la nostalgie, ces souvenirs tantôt tristes , tantôt gais qui font une enfance et les fondements de la vie.

Picouly sait raconter les histoires, nous donnant presque à voir cette Citroen traction qui se remplit des treize enfants grâce à ce père  » grand physicien » de parvenir à cet exploit,  ou cette mère « chimiste » qui invente « le gratin à rien ». C’est en effet l’époque du lait Mendes France dans cette France d’après-guerre, des familles qu’on retrouve mortes au petit matin à cause du monoxyde de carbone, « tueur saisonnier ». Et même si les souvenirs c’est « mal élevé » et qu »‘il faut beaucoup de temps pour les polir », ceux de Daniel Picouly s’ égrènent tels des petits cailloux lancés au fil de sa pièce; son plaisir de lire, au début pour séduire des filles « fatiguées d’être belles », sa découverte de Proust « un auteur étranger » à cause de l’une d’elle et qui « lorsqu’il respire un buisson d’aubépines en parle sur 30 pages tandis que moi, je dis juste ça sent bon! ».

On rit beaucoup, on est ému aussi comme lorsqu’il évoque cette petite soeur « qui n’a pas attendu la fin de l’histoire » et l’on découvre grâce à lui les mécanismes de l’écriture, « devoir écrire en amant et se relire en mari », une fois la passion amoureuse de la nuit d’écriture retombée…ou encore que « l’action doit toujours l’emporter sur le commentaire ». De quoi renseigner les futurs écrivains et passer un moment où l’intelligence et l’humour s’accordent avec bonheur.

LM

La faute d’orthographe est ma langue maternelle- Théâtre Tristan Bernard à 19 heures

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