25 juin 2017
Walker Evans est à Beaubourg

Voici la première grande rétrospective dans une institution muséale de Walker Evans (1903-1971), photographe majeur du XXème siècle; au total 400 œuvres issues de collections privées ou publiques mais également des propres collections réunies par Walker Evans lui-même durant toute sa vie qui dressent le portrait d’un photographe passionné.
Un homme qui dépeint l’Amérique de la grande dépression par une photographie documentaire bouleversante mais aussi fasciné par la photographie dite Vernaculaire c’est à dire populaire, domestique et utilitaire et son attirance pour la culture populaire américaine, les affiches et les routes.
 
Le travail documentaire de Walker Evans au cœur de l’Amérique des années de la grande dépression porte un regard réaliste sur des fermiers. Réalisée durant l’été 1936 en compagnie de l’écrivain James Agee, il photographie notamment pendant trois mois trois familles de métayers en Alabama. « Let Us Now Praise Famous Men » (Louons maintenant les grands hommes) sera un classique de la littérature américaine en 1941 et une des séries de photographies les plus connues de Walker Evans. L’exposition présente notamment deux tirages presque similaires et pourtant légèrement différents d’une mère Allie Mae Burroughs (photo très connue). Sur l’une, elle sourit légèrement si l’on observe bien sur l’autre non. L’autre photo marquante est celle du père et de sa fille qui fixent le photographe. Cette image très forte montre qu’ils n’attendent rien, ils sont là, présents, dans la force de leur regard, dignes. L’autre travail photographique documentaire conséquent concerne la grande crue de 1937 où Walker Evans photographie les noirs et les blancs (dans des campements séparés) en quête de nourriture…il est bouleversé lorsqu’il saisit ces images.
 
Ce qui fait toute la puissance photographique de Walker Evans c’est sa fascination pour les affiches, les publicités (son père était d’ailleurs publicitaire), les objets de tous les jours. Le monde qui l’entoure, le simple et le quotidien se transforment en œuvre d’art. Il est à la recherche de ce qui caractérise la culture vernaculaire des Etats-Unis. C’est sa rencontre avec Berenice Abbott qui lui montre de vieux clichés de Paris d’Eugène Atget qui vont l’inspirer. Il photographie les affiches publicitaires, les devantures de magasins ou d’échoppes sur les bords des routes qui pour attirer les clients regorgent d’astuces visuelles.
 
Walker Evans réalise également un autre travail sur la ville en série avec des églises, des façades sans y mettre grand chose de personnel, en restant presque « extérieur ».
 
Sa série de portraits « Passeurs Anonymes » est étonnante. Posté à un endroit précis il photographie les visages de personnes qui rentrent du travail, comme s’il parvenait à les extraire de leur environnement. Enfin, son autre série « En Transit », montre des passagers du métro new yorkais qui viennent sans le savoir se mettre devant son appareil qu’il dissimule. Il transforme alors le métro en photomaton.
‘Une bonne exposition est une leçon pour le regard « disait-il. On ne saurait mieux en sortant de l’exposition en  être convaincu…
 

Par Karine S. BOUVATIER

 Walker Evans, Centre Pompidou, jusqu’au 14 août 2017

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