14 juillet 2012
Vent Printannier

C’était le 16 et 17 juillet, en plein été, mais c’est avec ce nom plein de poésie que les allemands nommèrent l’opération qui mena la France en 1942 à sans doute l’un des pires chapitres de son histoire contemporaine: la rafle du Vel d’hiv. C’était il y a soixante dix ans, autant dire combien il y a aujourd’hui encore  des témoins vivants… Cinquante bus parisiens furent réquisitionnés par la police française qui se chargea de ce travail au petit matin que d’aucuns pouvaient considérer comme un autre, vu la façon dont les juifs avaient été dégradés de leurs droits- dans l’indifférence générale. Comme ces enfants interdits de parcs publics, de prix d’excellence ou de cinéma car portant l’étoile jaune.  » Le haussement d’épaules des gendarmes est demeuré plus profondément gravé dans ma mémoire que le hurlement des suppliciés » écrira Arthur Koestler. L’objectif initial désignait 28 000 personnes au total, mais ce n’est « que » 14 000 juifs qui furent finalement arrêtés avec les scènes épouvantables dans les immeubles, dans les rues que l’on peut imaginer, le tout sous le regard des parisiens. Il n’y eut pas de soulèvement de la population, pas de manifestation. Parqués huit jours dans ce stade du Vel d’hiv,  dans une touffeur effrayante, avec la moitié des toilettes que l’on avaient condamnées car les fenêtres donnaient sur la rue pour qu’ils ne puissent s’échapper. Fausses couches, crises cardiaques, coliques, coqueluches. Les surveillants n’eurent pour seule plainte que celle de l’odeur, de cette urine qui dégoulinait le long des gradins tandis que tous étaient condamnés à faire sous « eux ». Parmi ces martyrs, 4000 enfants que Laval avait, de son propre chef, proposé aux allemands de rajouter dans les convois qui partirent peu après- 300 étant déjà morts sur place. Une semaine après, il ne restait que des cendres des autres.

Traque sans relâche

Certains d’eux ont pu avant cela laisser des lettres,  des dessins de ces « haricots verts », les soldats allemands que l’on peut retrouver dans l’exposition bouleversante C’ étaient des enfants à l’Hôtel de Ville, racontant ce quotidien des camps, ces séparations et ces rafles qui n’en finirent pas. Et cette reconstruction après, cet hôtel Lutétia où l’on revient hagard pour les quelques petits survivants en espérant retrouver ses parents. Un cinquième des enfants juifs survécurent, sauvés par des réseaux comme celui de Suzanne Spaak, une femme belge, riche, cultivée et elle même mère, qui pendant que Florence Gould tenait salon, ne supporta ce que tant d’autres supportèrent, les yeux baissés. Elle le paya de sa vie,  exécutée par les nazis après avoir été torturée. Des photos, des jouets et des registres contiennent les noms de tous ces enfants qui avaient échappé grâce à elle et tant d’autre à la rafle, avec les mentions : date de naissance, situation de famille: parents déportés, observation: très court séjour, pris par la police. Car, ce fut ensuite une traque sans relâche menée par la police française, commençant pour les enfants dès l’age de 2 ans. Dans le carnet pour témoigner, les mots manquent comme si les larmes seules pouvaient dire ce que fut cette horreur au coeur de l’été français et à tout jamais une tâche pour notre pays. Et pour tous ceux qui osèrent dire, « on ne savait pas », une page d’un  journal témoigne dans son édition de 1942 que c’est bien pour être gazés que ces juifs furent parqués pires que comme des bêtes, tandis que si le convoi emportant les oeuvres d’art volés au Louvre par Goering fut saboté, le dernier,  le 17 aout 1944, contenant des juifs passa lui, sans encombre.

 

Par Laetitia Monsacré

C’étaient des enfants-exposition gratuite Du 26 juin au 27 octobre à la Mairie de Paris-entrée gratuite

Sur cette photo, tous les enfants furent déportés et seule, l’une d’elle a survécu. La plus jeune avait 5 ans.

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