10 mars 2012
Un huit clos déjanté

Le 7 avril, ce sera trop tard pour aller voir Karin Viard au Théâtre Marigny. L’actrice n’a eu ni César, ni Oscar cette année, et Hollywood ne l’a pas vue sur scène, mais qu’elle y est drôle, tragiquement belle et spontanée. Vivante ! Et totalement déjantée. Karin Viard est étonnante en effet dans ce rôle  qui fait le succès de la  dernière pièce de l’argentin Rafael Spregelburd. L’ouverture de Lucide au Théâtre Marigny est déconcertante. Un grand échalas très maigre apparaît face au public pour raconter sa première émotion footballistique. C’est Lucas, le fils de Karin Viard. Traumatisé par sa mère, il parvient grâce à ses « rêves lucides » à créer un univers parallèle qui lui permet de contrôler sa vie. Ou du moins d’essayer. Il est « coaché » par un psy/prof de tennis/serveur de restaurant improbable/et/amant-de-maman… Névroses à tous les étages. « Lucide » démarre au quart de tour, c’est un spectacle très vif, où l’hystérie de personnages tisse en réalité une trame assez grave. La famille pourrait s’entendre à merveille, Lucas serait aux anges. Patatras ! La machine dérape, l’excitation vire au drame, la psychose reprend le dessus. Coiffée d’une choucroute blonde digne de la comédie musicale Hairspray de John Waters, Karin Viard est en permanence au bord de la crise de nerfs. Son fils tente de couper le cordon, sa fille revient à la maison après quinze ans d’exil supposé à Miami: en fait, elle vivait à Béthune ! On ne s’ennuie pas chez Karin Viard, alias « Tété ».

Un jeu de massacre décapant

Le cocon de « Lucide » carbure à pleins gags, à coups de saillies, dans une surenchère de drôles de délires. « On trouve chez Spregelburd une véritable liberté du propos», se félicite le metteur en scène -argentin, lui aussi- Marcial Di Fonzo Bo,  cela procure une véritable énergie et un questionnement permanent que l’on ne rencontre pas en France où les textes sont inscrits dans une logique qui « contraint », plus qu’autre chose. « Accompagner un compatriote n’a été qu’une sorte de récompense personnelle » ajoute-t’il. Les textes de Spregelburd sont célébrés depuis des années sur les plus grandes scènes européennes (au Royal Court de Londres, au Piccolo Theatro de Rome, ou à Barcelone…), mais ils étaient inconnus en France ». Voilà donc une belle occasion de découvrir cet auteur argentin atypique, excellemment servi par de grands acteurs :  Karin Viard, Léa Drucker, Micha Lescot et Philippe Vieux. « Le théâtre est un moyen de résistance, un endroit où l’on peut parler et dire tout ce que l’on ne dit pas normalement », explique Marcial Di Fonzo Bo. « Lucide » tient du jeu de massacre. Décapant.

Par Ulysse Gosset

 

Lucide au Théâtre Marigny du mardi au samedi 21h, matinée samedi 16h30 Relâches les 31 janvier, 7, 8 et 24 février 2012-

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