24 février 2023
Ukraine, un an

Dans l’excellente émission C Politique, diffusée le dimanche soir sur France5 à 18h25, le présentateur s’étonnait, en cette triste semaine anniversaire de l’invasion de l’Ukraine par l’armée russe (objet d’un déni total il y a un an malgré ses signes avant-coureurs, annexion de la Crimée, regroupement de chars russes aux frontières du Donbass) que « les Français ne mordent pas ». Il y a pourtant eu, au début,  lors de ce qui est la plus grande vague d’immigration depuis la seconde guerre mondiale, quantité de sujets aux JT pour montrer comment la population française se mobilisait pour accueillir les réfugiés ukrainiens. Un an plus tard, BFMtv voit ses audiences chuter dès que la chaîne d’info  traite du conflit russo-ukrainien tandis que les Français se passionnent pour l’affaire Palmade. Un bon fait divers, impliquant un people, voilà qui détend le téléspectateur, confronté dans sa vie quotidienne à sa « propre »guerre; se nourrir malgré l’inflation galopante, se vêtir malgré des centaines de fermetures d’enseigne, se divertir malgré un ticket de cinéma à 15 € ou encore se déplacer avec des prix à la pompe dépassant les deux euros. Quant à l’avenir, il parait bien anxiogène, entre cette réforme des retraites et le réchauffement climatique qui, après les canicules estivales, prive la France entière d’eau. Un drame pour les agriculteurs dont ils feront le sujet principal de leur discussions pendant le salon de l’Agriculture qui s’ouvre ce week-end, échangeant également sur la guerre d’Ukraine, mais pour ses conséquences sur le prix de leur engrais, du gasoil ou du soja pour les éleveurs.

Du prix du gasoil à Odessa

C’est ainsi que les rédactions creusent plus encore le fossé entre les Français, apparaissant comme « à côté de la plaque »dans leur mise en avant des exploits de leurs grands reporters, victimes, une fois encore, de « consanguinité ». Alors, en ce vendredi 24 février 2023, il fera bon se détendre ce soir sur Canal Plus avec les paillettes des César, feuilleter le Harper’s Bazaar (lire notre article) qui sort en version française, malgré sa Une ô combien indécente qui ose « A la vie, à la mode », alors qu’à quatre heures de route, on vit, quotidiennement, dans sa chair, « A la vie, à la mort ». Voilà qui confirme que la meilleure façon d’échapper à tout ce vacarme- des commentaires d’experts aux explosions de missiles, c’est d’écouter, en ce matin ensoleillé sur Paris (où la tour Eiffel était hier soir aux couleurs de l’Ukraine), France Musique qui consacre son antenne à l’Ukraine comme dans la spéciale Allegretto de Denisa Kershova, en hommage à la ville-musique, Odessa. Entre Kiev, qui a vu naître Vladimir Horowitz et Franz Liszt y rencontrer sa dernière compagne, ou ce port sur la Mer noire, enjeu capital dans le conflit actuel, on en avait oublié la richesse culturelle de jadis et d’aujourd’hui, que résume cette jolie phrase: « Quand on ne rencontrait pas une jeune homme avec un violon sous le bras, c’est qu’il jouait du piano ».

Par Laetitia Monsacré

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