7 janvier 2023
Rosa Bonheur,la bien nommée

 

Autant dire que lorsque le musée d’Orsay organise une exposition, c’est en profusion que les oeuvres sont offertes aux visiteurs, avec un prix à payer: des salles où se frayer un chemin est des plus ardus. Avec près de deux cents huile, dessins et même sculptures, l’exposition sur Rosa bonheur, demeurée inconnue en France malgré son talent exceptionnel de peintre animalier, on est loin du calme sa magnifique maison- atelier et parc de By-Thomery, dans la forêt de Fontainebleau où elle put à loisir peindre chevaux, cerfs ou encore les lions dont elle avait fait venir un couple en disant au transporteur qu’il s’agissait de chatons! Car, elle les aimait les animaux, Rosa Bonheur, cela dès son enfance à Bordeaux,  lorsqu’elle s’appelait encore Marie Rosalie Bonheur,  marquée par le drame de la perte de sa mère à onze ans. C’est elle qui lui avait trouvé ce diminutif de Rosa dans cette famille de quatre enfants, tous devenus artistes. Il faut dire que le père, Raymond Bonheur était lui aussi peintre et offrit dès le départ le cadeau dont tous les enfants rêvent: « Suis ta vie ». Cela permit à Rosa de devenir une star de son temps comme en atteste la provenance des oeuvres réunis venant des musées du monde entier jusqu’à la famille royale anglaise dont le nouveau roi Charles III a prêté un profil de tête de lion confondant de réalisme. Car, mieux que quiconque cette femme libre a su capter l’âme des animaux à travers leur regard, « une chose que j’observais avec un intérêt spécial, c’était l’expression de leur regard, l’oeil n’est-il pas le miroir de l’âme pour toutes les créatures vivantes? « . Ainsi, comme ils semblent vivants ces chiens, ces bovins, ce renard ou ce cerf au pelage si bien restitué qu’il prend l’envie de caresser les toiles.

L’arche de Noé avec les deux femmes de sa vie

Repérée dès 1840, à l’âge de dix-huit ans  en exposant ses deux lapins, Rosa rencontre vite le succès ô combien mérité avec ses tableaux animaliers. de quoi pouvoir s’offrir à 38 ans un petit château où elle vivra bientôt entourée de ses animaux et en compagnie de l’artiste peintre américaine Anna Klumpke, de trente -quatre ans sa cadette de 1898 jusqu’à la mort de Rosa en 1899. Anna sera la mémoire et la légataire universelle, autrice d’une biographie qui fait encore aujourd’hui date. A By, Rosa bonheur pourra observer et peindre à loisir les animaux dans leur cadre naturel, aussi douée pour représenter l’écorce d’un arbre ou son feuillage. C’est dans son atelier, qu’elle nomme son « sanctuaire », lieu central de sa maison et de liberté absolue où sont encore exposés esquisses et animaux empaillés comme la tête de sa jument favorite. Elle y vivra tout d’abord Nathalie Micas, rencontrée à l’âge de 14 ans, une fillette de deux ans plus jeune qu’elle,  qui deviendra sa compagne et que seule la mort de Nathalie, 53 ans plus tard, les séparera. C’est elle qui l’aidera à l’élaboration de ses toiles en reportant les calques et en préparant les fonds de toiles immenses pour rendre compte de cette arche de Noé reconstituée. En rencontrant Buffalo Bill à Neuilly, Rosa y ajoutera bisons et mustangs dans une toile restée inachevée qui clôt cette superbe rétrospective saluant le bicentenaire de la naissance de Rosa Bonheur qui a su résolument honorer son nom de famille.

Par Laetitia Monsacré

Rosa bonheur, au Musée d’Orsay jusqu’au 15 janvier 2023

Des animaux plus vrais que nature, entre leur regard empli de peur, leur pelage ou les détails de leur anatomie, sans oublier l’humour avec cette famille de lions, trois lionceaux comme trois enfants, l’idéal bourgeois de l’époque

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