5 janvier 2013
Rien ne se perd, tout se transforme


« Qui a dit que l’Art ne pourrait pas sauver le monde ? ». En tous les cas, pas les 60 artistes engagés qui occupent l’Espace des Blanc Manteaux en ce moment. Au cœur du Marais, la rue Vieille du Temple prend des airs de militantisme façon Greenpeace.  Ici des vieux pots à lait aux piles usagées, tout se recycle pour cette septième édition, fruit d’une lutte, éthique et esthétique, qui sort de ses gonds. De l’art contemporain conforme au développement durable, c’est le principe de cette exposition organisée par Court Circuit, qui déborde d’imagination et de surprise. Si l’artiste « citoyen du monde » se questionne sur le rôle de l’environnement, le visiteur retrouve son âme d’enfant. Point fort, chacun peut repartir avec l’œuvre élue de son cœur sans s’endetter.

La métamorphose des matériaux

Le titre du salon est assez explicite. Ici, c’est le processus de transformation d’utilité de l’objet qui guide le travail de l’artiste-transformer. On se souvient de l’exposition en novembre dernier de Bernard Lavier, au centre Pompidou, à quelques pas de là, qui voulait « donner une seconde vie aux objets industriels ». Ces descendants de l’Arte Povera, les nouveaux réalistes et l’Ecole de Nice : de Germano Cervant à César et Arman en passant par Daniel Spoerri , s’inscrivent dans la même lignée.« La différence étant qu’aujourd’hui nos artistes en font des produits finis puisque la métamorphose de ces matériaux donne naissance à des tables, des meubles, des miroirs et autres créations s’intégrant dans notre vie quotidienne ». C’est le cas de Jean-Michel Bliard d’abord sculpteur avant d’être concepteur de meubles-à-regarder. Qui n’a jamais rêvé de ranger ses sous-vêtements dans une armoire-chaussure ? On pense d’ailleurs à la Vénus de Milo à tiroirs de Salvador Dali (actuellement exposé au centre Georges Pompidou), devant ses œuvres.

« L’art du beau se cultive donc en art de l’utile en ce qu’il sert une nécessité, plus, une urgence : celle de sauver un objet devenu inutile de la destruction… non pas de la sienne propre, mais bien de celle de la planète, donc de l’Homme. » Au cours de votre déambulation, ne manquez pas d’observer les cuillères métamorphosées en joueurs de contrebasse, conçues par un charmant couple champenois qui ne lésine pas sur les blagues. Les lampes très déco industrielles faites à partir d’objets insolites ne manqueront pas non plus d’en séduire plus d’un. Les tableaux intitulés « poésie déchetales », « composés de matériaux récupérés sur les plages » raviront vos sens. Un peu plus loin des petites maisonnettes abritant des marionnettes hantent les Blancs Manteaux. Yannick Noah en aurait fait une razzia.

Il est 20h, les Blancs Manteaux s’éveillent

« Si vous avez besoin de nous, on est au bar ». Leitmotiv des exposants. L’ambiance est assez « baba-cool » comme les artistes le disent eux-mêmes. A l’heure de la fermeture officielle, les bouchons sautent, et les langues se délient. Les clopes s’allument et la fumée remplit l’Espace culturel. Un enfant joue avec une sculpture comme avec un ballon de foot. Tout est normal. On est loin du commercial ici, les artistes comme, les œuvres ont une âme. Le bar est jonché des petits soldats en plomb, en hommage au créateur, décédé d’une cirrhose peu avant l’ouverture. Une chose est sûre, vous ne serez pas déçu d’aller y faire un tour.

Par Elodie Terrassin

« La métamorphose des matériaux » jusqu’au 6 janvier à l’espace des Blancs Manteaux. Entrée gratuite

Articles similaires