11 février 2013
Nous sommes tous Maliens

Il fallait voir vendredi soir la salle du Zénith se vêtir  des couleurs du drapeau malien sur le rythme endiablé de Amadou et Mariam, Victoire de l’album Musiques du Monde. Accompagnés de M, ils ont mis du soleil dans cette froide soirée de février, à l’image du voyage éclair de François Hollande qui, à Tombouctou samedi dernier, a trouvé des gens pour le « bénir » et lui dire « on t’aime ». Voilà qui ne lui était pas, depuis le mois de mai dernier, arrivé… Une bonne petite guerre, voilà bien de quoi redorer le blason de n’importe quel président à condition qu’elle soit « petite »…Vite fait, bien fait ce qui semblait le cas depuis trois semaines. « L’Islam n’est pas une religion mais un stand de tir » ont ironisé justement les Guignols; que ne fait-on en son nom…A voir Syngue Sabour, le très beau film de Atiq Rahimi qui sort le 20 février, adaptation de son livre éponyme qui a obtenu le Goncourt en 2008, on mesure la violence du fanatisme de ces combattants invoquant le Coran et qui par ailleurs violent sans vergogne lorsqu’ils ne tuent pas. Car de Kaboul à Bamako, les mêmes scènes se reproduisent, les mêmes horreurs avec cette idée que « ceux qui ne savent pas faire l’amour font la guerre ».

Femmes violées car non voilées

Parce qu’une jeune Malienne Asahara, 20 ans, n’avait pas la tenue prétendument opportune et respectueuse envers Allah, elle a raconté aux médias français comment elle a été arrêtée et violée par ces mêmes hommes qui disent faire respecter la parole sainte… Dans le film de cet auteur afghan, la femme fascinante-Golshifteh Farahani-  doit de ne pas l’être qu’en disant qu’elle est une prostituée, et donc jugée impure. Les soldats du Mouvement national pour la libération de l’Azawada ont pour leur part enlevé des fillettes de 12 ans sous les yeux de leur mère ou les ont séquestrées sous prétexte qu’elles ne portaient pas le voile, jusqu’à une douzaine de femmes dans un local à Tombouctou pour pouvoir les violer. Alors on comprend aisément que le peuple a été heureux de pouvoir accueillir le président français en libérateur dans ce pays où des cultures aussi fortes que celles des dogons dans la région de Ségou, vers le fleuve Niger, ont vu le jour. Car le Mali, ce n’est pas juste un pays à la une des journaux mais aussi toute une culture d’une richesse inouïe comme en témoignent les collections permanentes du magnifique musée du Quai Branly. Ainsi la falaise de Bandiagara, si bien racontée par Marcel Griaule, ses ancêtres, ses chefs religieux comme le chef Ogon, ses rites initiatiques et ses objets secrets à découvrir dans des petites alcôves au-dessus de la Seine, plongées dans la mi-obscurité.

De Kaboul à Tombouctou

Quant à Tombouctou, Cité aux 333 saints, classée à l’Unesco, il y a été commis un véritable  « crime culturel » avec , à l’instar des talibans en Afghanistan, les islamistes qui y ont détruit depuis avril 2012 une douzaine de mausolées de saints musulmans, y voyant une « idolâtrie ». Les djihadistes ont également brûlé quelque deux cents manuscrits remontant aux XVe et XVIe siècles, époque où Tombouctou était la capitale intellectuelle et spirituelle de l’Islam en Afrique. Essentiellement rédigés en peul et en arabe, ils traitaient d’astronomie, de musique, de botanique, de droit, d’histoire, de politique…

La politique qui a permis enfin d’aider ce pays à se libérer de ses combattants qui au nom de Dieu n’ont semé que la terreur. Ce qu’ils tentent désormais de faire avec la phase la plus effrayante dans toutes les guerres-le terrorisme. Alors espérons que le Mali ne devienne pas un nouvel Afghanistan, même si contrairement à là-bas, les islamistes ne bénéficient pas du soutien de la population et ne sont pas unis. Il reste malheureusement d’autres composantes…

 

Par Laetitia Monsacré

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