18 novembre 2012
Musée Branly/ Objets fétiches et mascarades

Peu d’entre nous savent placer le Niger sur une carte d’Afrique; encore moins savent que ce pays est traversé d’un fleuve »nourrissant » à l’image du Nil, la Bénoué. Ainsi pour se situer d’entrée de jeu, une grande carte du Niger est suspendue à l’entrée de cette belle exposition où l’on peut très vite se rendre compte de la longueur de la rivière Bénoué, plus de 1000 kilomètres, prenant sa source au nord du Cameroun pour aller se jeter dans le Niger, un peu au sud de Abuja. Un repère géographique et kilométrique qui laisse imaginer le nombre de civilisations bordant cette rivière qui alimente trois vallées: la basse, la moyenne et la grande Bénoué.

Des coutumes qui voyagent

Sur un lointain rythme de tambours, de chants et de cris de foules qui sort des différents postes qui projettent les films d’archives, on déambule dans l’allée circulaire à la recherche de précision sur ces 150 objets rares qui nous entourent, et ce n’est pas si simple. Les Igala, les Ebira, les Jukun, les Mumuye, ou encore les Ga’anda, plus de 25 groupes ethniques à découvrir; tous vivent dans la vallée de Bénoué  et ont tous à l’origine des coutumes et des traditions différentes rattachées à leur village. Avec les migrations de ces civilisations, leurs coutumes ont fait le voyage, avec à l’arrivée des difficultés à savoir  de quel village d’origine telle ou telle coutume provient. Des coutumes toutes aussi surprenantes les unes que les autres qui mettent en œuvres des objets fabriqués dans les villages, et qui restent sur place ou sont troqués à d’autres villages voisins.

La mascarade, pour honorer

Des escales autour de films d’archives, réalisés par l’historien Arnold Rubin lors de ses voyages, nous plongent au cœur des rites de la mascarade ancestrale. Vêtu d’une colonne en tissu à franges recouvrant également la tête ou d’un costume poilu et d’un masque à cornes, « le déguisé servant » rentre en scène au rythme de tambours et de chants et la mascarade peut commencer. Elle était organisée pour honorer des personnages importants du village, guerriers, ancêtres ou encore le chef du village. Les masques, souvent présents lors de ces cérémonies, sont soient fabriqués à l’horizontale comme une couronne, ou à la verticale. Les masques verticaux sont beaucoup plus impressionnants par leurs tailles et leurs hauteurs. Il est d’ailleurs très difficile en les regardant de comprendre leurs modes d’usages même après lecture de l’explication… Les statues, elles aussi, font appel au spirituel, aussi bien en basse Bénoué, avec les maternités qui servaient à protéger la santé des mères et des enfants, qu’en moyenne Bénoué avec des sculptures masculines/ féminines qui protégeaient l’individu. Des objets tout aussi intrigants et étonnants les uns les autres lorsque l’on prend conscience de leur importance au sein de ces villages qui les chérissaient comme des êtres humains, faiseurs de bien-être et de protection.

Argile, ma belle argile

Dans la haute Bénoué, plus de masques et de statues en bois, ce sont les pots et les récipients en céramique qui sont au cœur des activités rituelles et des croyances spirituelles. Des objets en argile, sous la forme de vases, qui étaient conçus par les villageois pour contenir des forces spirituelles. A la fin de l’exposition, plusieurs de ces vases sont exposés ; ils auraient été créés pour protéger un fœtus dans le ventre de sa mère ou pour soigner des maux de dos ou des nausées. Mais leur pouvoir pouvait aller beaucoup plus loin, certains villageois s’en servaient également pour enfermer des maladies…Bref beaucoup de fétichisme et de spiritualité, ô combien disparus dans notre société.

Par Laura Margis

Nigeria, Arts de la vallée de la Bénoué, jusqu’au 21 janvier 2013, au musée du Quai Branly

Articles similaires