8 mars 2013
Jérôme Savary/ L’ogre mélancomique

Jérôme Savary ne fera plus d’autres tours de piste. Metteur en scène génial, il s’en est allé sans fanfare cette semaine après avoir apporté avec son Grand Magic Circus- rien de petit chez lui- le rire et le spectacle dans ce qu’il peut avoir de plus inspiré. Cigare au bec, amateur de Shakespeare, il monta quantité de pièces, adaptant Jules Verne ou Uderzo, pour coller à son univers décalé voire déjanté. Car le style de Jérôme Savary était comme chez tous les grands créateurs, reconnaissable de suite: associant la poésie au comique, avec l’idée d’être « au service » du public, comme à l’Opéra-Comique qui le fut vraiment pendant sa direction jusqu’en 2006 et auparavant à Chaillot dès 1998, où il fit découvrit le hip-hop grâce au tandem Montalvo et Hervieux.

Faire avec de l’art et des gens, de l’argent

Il faut dire qu’il ne venait pas de n’importe où le bougre, né en Argentine d’un père écrivain et d’une mère américaine de la haute bourgeoisie, fréquentant à New York à 19 ans Count Basie ou les poètes de la beat generation comme Jack Kerouac et, Alan Ginsberg. De quoi lui donner un goût pour l’indépendance et un sacré caractère, montant sa propre compagnie dès l’âge de 23 ans avec Topor, Arrabal  et Jodorowsky,  le « Grand Panic circus »-tout un programme. « Panic » se transformera par la suite en  « Magic » où de jolies femmes se succèderont et dont il en épousera certaines… Cabaret avec Ute Lemper qu’il a découverte, La Périchole, Rigoletto, Les Contes d’Hoffman, La légende de Jimmy, Marilyn Montreuil, Irma la douce, les créations pour le théâtre, l’opéra et le music hall ou l’opérette se succèderont à un rythme d’enfer -plus de 80 en quarante ans- avec cette idée que dans la vie, comme il me l’avait dit, alors toute jeune journaliste, « il y a l’art, les gens et avec les deux quand on est doué, on fait de l’ar(t)gent… » Sa dernière création de théâtre populaire, Tartarin de Tarascon, à Noël dernier, venait d’être diffusée sur France 2 en janvier dernier avec  Michel Galabru. Quant à sa verve, on la retrouve intacte dans son beau livre intitulé justement Le Dictionnaire amoureux du spectacle, à moins que vous ne choisissiez d’en savoir un peu plus dans sa biographie qu’il avait joliment intitulée Ma vie commence à 20 heures 30. C’est également autour de cette heure-là, ce lundi 4 mars, que celle-ci a fini. Et qu’il est parti mettre en scène les vraies étoiles…

Par Laetitia Monsacré

Ps: Il est fort dommage et étonnant que la télévision publique ne lui ait pas rendu hommage. Ce n’est pourtant pas ses spectacles populaires qui manquaient…

 

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