1 octobre 2016
Les migrants, un devoir d’accueil

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Ce vendredi 30 septembre, les Rafales français ont frappé; Mossoul en Irak, rien pour Alep. Dans la ville assiégée et désormais martyre de Syrie, célèbre pour son savon et son patrimoine classé à l’Unesco, la pire catastrophe humanitaire depuis la seconde guerre mondiale selon Médecins sans frontière est pourtant en train de se dérouler. On compte déjà 350 morts en une semaine dont une centaine d’enfants et près de mille blessés sous les bombes de Bachar El Assad et des Russes. Sans eau courante, sans électricité, les survivants vivent comme des rats. Autant de Syriens qui n’ont pas eu la chance de pouvoir partir et remplir les camps de réfugiés, ou pour les plus riches, de s’embarquer après un périple de plusieurs semaines, dans des bateaux poubelles enrichissant les passeurs. Ces épaves dont les images font l’actualité depuis des mois comportent plusieurs « classes » comme un TGV ou un avion comme nous l’apprend le documentaire coup de poing de Gianfranco Rosi, Fuecoammare, Ours d’or ô combien mérité à la Berlinade. 2000 euros en haut du bateau, 800 euros à fond de cale. Après sept jours de mer, pour ceux qui ont la chance d’arriver à Lampedusa, porte d’entrée de l’Europe située en Italie (on y compte 400 000 migrants depuis 20 ans), cela commence par une couverture de survie qui transforme ces migrants en bonbons dorés, bientôt fouillés et photographiés. « Dieu nous a sauvé, Nous sommes ici ». La plupart se réjouissent tandis que d’autres pleurent comme cette femme qui demande s’il reste des « noirs dans le bateau »-15 000 personnes se seraient noyés depuis l’an 2000- ou cet homme dont une larme de sang descend lentement sur la joue.

On ne s’habitue pas à la mort

Le plan arrêté sur son visage couvert de sable où les larmes se mettent à couler vaut tout les reportages, les discours, les articles. Le long travelling dans la cale où gisent des corps aussi.« L’art est totalement inutile » disait Oscar Wilde. Pourtant à voir ces deux heures de film, on est saisi par la détresse de ces migrants. Et par notre responsabilité. « Tout homme a le devoir de secourir ces hommes s’il en est un ». Le docteur qui les ausculte, qui les réhydrate, qui panse leurs brulures suite aux fuites de gasoil ou qui coupe un bout d’oreille aux enfants morts pour effectuer des prélèvements apparait tel un bloody angel, même s’il confirme qu’au fil des mois, il « ne s’habitue pas à la mort. Tout cela te laisse avec une colère, un trou ». Parqués derrière des grilles, les migrants sont ensuite condamnés à attendre, en jouant pour certains au foot avec des buts. Des hommes comme nous autres, qui ont choisi de prendre le risque de la traversée car « il est risqué de ne pas prendre de risque, la vie est elle même un risque » comme le souligne un migrant.

La chance de vivre en France

Des migrants souvent apparentés à des terroristes par des populations qui, comme en Hongrie, semble frappée par autant d’ignorance que les ceux qui posent des bombes au nom d’Allah. Ce pays s’apprête aujourd’hui à voter massivement non pour accueillir les réfugiés, alors que l’union européenne ne les a contrait qu’à en accueillir un millier. Une paille montée en épingle par le gouvernement qui fait pire dans ce petit pays pourtant assez riche que Donald Trump en matière de discours xénophobe. En France, on est guère mieux loti, avec des hommes politiques qui font campagne autour de la fermeture de nos frontières. A voir le toujours aussi émouvant et réussi Dans les yeux d’Olivier sur France 2, on découvre pourtant la richesse que peuvent apporter à la France les réfugiés qui comme Héritier, le petit garçon angolais devenu un solide homme d’affaire ou ce couple de bosniaques ont trouvé des Français qui leur ont ouvert leur portes. « Je suis père et vis à vis de mes enfants, je ne pouvais pas ne rien faire » explique cet homme qui a aidé, accueilli chez lui comme une évidence ces étrangers contraints à l’exil. Une jeune Guinéenne a, elle, bénéficié de l’hospitalité de France terre d’accueil et du système scolaire français alors que des associations comme Utopia 56 mobilisent au quotidien des bénévoles à Calais. « Vous ne réalisez pas quels chance vous avez de vivre dans un pays en paix ». En Italie, Matteo Renzi a fait des copies sur Dvd de Fuecoammare pour tous les dirigeants européens. En France , c’est Arte qui le diffusera, on espère en prime time- France Télévisions devrait faire de même, afin que les Français voient ces hommes, ces femmes et ces enfants avant d’aller voter.

 

Par Laetitia Monsacré

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