17 juin 2013
Le casse du siècle

Quiconque connaît la garde à vue sait qu’après deux jours, coupé de l’extérieur, à passer des heures à attendre que l’on vous interroge,  les lacets et la ceinture retirés, la délivrance de pouvoir parler est telle que l’on est alors prêt à jurer n’importe quoi, même que l’on est coupable lorsque l’on est innocent.  Stéphane Richard habitué au luxe que lui confère sa fonction depuis des décennies a mis quarante-huit heures à réaliser que pour retrouver sa liberté, il valait mieux ne pas bluffer comme sa fonction l’exige au quotidien et dire la vérité. Et donc finir par reconnaître que c’est le Président lui-même qui avait été partie plus que prenante dans la décision d’arbitrage en faveur de Bernard Tapie, déjà condamné pour escroquerie, fraude fiscale et matches de football truqués avec l’idée, que le soir de l’élection de Sarkozy, il pouvait sans aucun doute s’écrier:  » Ça y est,  j’ ai les sous. » En l’occurrence 403 millions d’euros en juillet 2008, soldant son litige avec le Crédit lyonnais alors que la justice était sur le point de le retoquer. A ajouter aux 45 millions qu’ il a touché au titre de dommages et intérêts pour préjudice moral alors que la Cour d’Appel lui avait consenti un euro dans son jugement rendu au préalable! Lesquels sont à comparer par ailleurs au dernier record au titre de l’indemnisation du préjudice moral de 700 000 euros pour  Patrick Dills, lequel a passé pour rien 14 années de prison…

Tous complices

« Mon nom est désormais associé à celui de voleur » s’était écrié alors Bernard Tapie pour se justifier. On en sourit aujourd’hui d’autant qu’en qualifiant le recours à l’arbitrage d‘ »escroquerie en bande organisée », les juges donnent une idée du genre des affaires qui ont été menées sous le septennat de Nicolas Sarkozy. Une bande à laquelle cela a plutôt porté chance jusqu’à présent: Christine Lagarde a hérité du FMI pour ses bons et loyaux services et Stéphane Richard de la présidence d’Orange qu’il est donc ce lundi assuré de conserver, l’Etat offrant ainsi à ses employés un bel exemple de probité – ils auraient eu tort de s’en priver, non? D’autant que l’un et l’autre ne devraient pas être inquiétés avec cette idée d’avoir été de simples lampistes… argument si souvent utilisé par les bons exécutants y compris dans les camps nazis. Responsable mais pas coupable. N’avoir rien dit, l’absence de conscience morale; ne pas avoir eu honte devant sa glace de cautionner cela pour rester à son poste et continuer tranquillement à servir un chef d’Etat qui se sert de l’argent du contribuable pour service rendu. Celui-ci donne pour sa part, aujourd’hui tranquillement des conférences dans le monde, à peine lesté de cette casserole de plus qui s’ajoute à celles de l’affaire Bettencourt, Kadhafi ou des frégates.

Le voleur à la tire lui ira en prison pour quelques centaines d’euros et le père de famille dont l’épouse et les deux enfants sont fauchés à mort devra se contenter comme ce mois-ci à Marseille de 300 000 euros au titre du préjudice moral versés par la compagnie d’ assurance du chauffard. Les citoyens ont l’Etat qu’ils méritent paraît-il…

Par Laetitia Monsacré

Articles similaires