10 décembre 2012
L’art de dénoncer

Que l’on soit «Aifan»-surnom donné à ses fans ou non, le film Ai Weiwei, Never Sorry, réalisé par Alison Klayman, est un formidable témoignage sur cet homme qui associe art et engagement politique afin de dénoncer les travers de son pays, la Chine. En le suivant au jour le jour, le spectateur se retrouve juge et partie des convictions, des actions et des combats de celui qui passa avec  son père, un grand poète et toute sa famille 17 ans en camp de « redressement ». Cet « éternel optimiste » qui « croit que tout est possible » n’est pas seulement un architecte, un sculpteur et un photographe, mais aussi un bloggeur et un accro aux médias numériques. Internet est pour lui devenu un outil ultime de liberté, même si en 2009, Ai Weiwei a vu son blog fermé, après la publication, sur celui-ci, suite à une enquête minutieuse, de la liste entière des écoliers victimes du séisme de la province du Sichuan – une liste qui était tenue secrète par les autorités chinoises aussi bien au niveau du nombre de victimes, que des noms.

Artiste enquêteur

« C’est étrange la liberté, une fois que vous y avez goûté, ça vous colle au cœur et plus personne ne peut vous en priver. » Que ce soit en 2009, à Munich, avec son exposition So Sorry, qui dénonce la responsabilité du gouvernement chinois dans la mort de ces milliers d’enfants « uniques » pendant le séisme, sous la forme d’une œuvre monumentale Remenbering – 9000 sac à dos d’écoliers tout en couleurs agrafés sur la façade du musée ; en 2010, à la Tate Modern de Londres, avec l’installation Sunflower Seeds composée de millions de fausses graines de tournesol, peintes à la main par des artisans chinois, une référence à l’histoire de la Chine sous Mao et à la place des paysans sous son régime ; ou encore cette année, au Jeu de Paume à Paris, avec l’exposition Entrelacs où sont affichés les clichés d’une série de photos où l’on voit le célèbre doigt d’honneur à Mao ou devant différents monuments dans le monde, Ai Weiwei  dénonce, inlassablement au risque de sa vie comme lorsqu’en avril 2011, il disparut. Après quatre-vingt-un jours, où personne ne sut où il était, Ai Weiwei réapparut, enfin libéré par les autorités chinoises. De quoi le réduire, depuis, momentanément au silence…Voilà en tout cas un film remarquable pour comprendre son engagement et sa personnalité.

Par Laura Margis

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