8 juillet 2013
La Flûte version vidéo enchantée

Fin de saison sous le signe de la féérie à l’Opéra de Lyon avec cette version de La Flûte enchantée mise en scène et en images par Pierrick Sorin. De ce conte initiatique aux consonances maçonniques – composé sur un livret de l’ami et frère Schikaneder – où le merveilleux remplit une fonction pédagogique, le célèbre vidéaste français livre une lecture littérale et illustrative qui fait la part belle à la magie et à l’émerveillement. Sur un écran qui descend régulièrement des cintres sont projetées des compositions illusionnistes élaborées devant des panneaux en carton et jouant sur les effets d’invisibilité. Certaines images exploitent avec bonheur les potentialités comiques du procédé, à l’instar de la tête du méchant Monostatos balancée d’une main à l’autre au rythme des clochettes de Papageno. Voie lactée en lever de rideau, voyage insonorisé au dessus des nuées pour passer du monde de la Reine de la Nuit au temple de Sarastro, décors dessinés par la vidéo, c’est à du grand spectacle que l’on est convié et l’on se prend très bien au jeu, même si la fin du second acte manque un peu de dynamisme.

Souffle de jeunesse sur la Flûte

Ce dont ne manque pas la direction survoltée de Stefano Montanari, qui apparaît aux saluts dans un look rock’n roll inhabituel à l’opéra. Les tempi sont allant, voire vifs, mais non précipités. La clarté de la polyphonie dans la fugue de l’ouverture ou la mise en valeur limpide des pupitres fait souffler un vent de fraîcheur et de juvénilité dans la fosse de l’Opéra de Lyon, et contagieuse jusqu’aux chœurs. La jeunesse, on la retrouve d’ailleurs sur un plateau  entièrement composé de chanteurs issus du Studio de l’Opéra de Lyon – une première –  dirigé depuis 2011 par Jean-Paul Fouchécourt, ténor léger à la française bien connu des amateurs de musique baroque – on se souvient de sa Platée à Garnier dans la mise en scène de Laurent Pelly.

De la Ferme à l’Opéra

Si les ateliers de professionnalisation  au sein des grandes maisons d’opéra sont désormais légion pour pallier le manque de préparation théâtrale des chanteurs issus des conservatoires, le Studio de Lyon offre la particularité d’être davantage un foyer pour découvrir et mettre en pratique les ficelles du métier qu’un centre de formation inféodé à l’institution. Tout commence à la Ferme aux Arts, propriété que Jean-Paul Fouchécourt possède au nord de Lyon, dans un petit village de trois cents âmes en Saône-et-Loire. Là, où tout n’est que calme, concentration et convivialité, les jeunes chanteurs se retrouvent par petits groupes durant des sessions d’une à deux semaines pour préparer les productions, avant le travail sur la grande scène de l’opéra.

Deux distributions alternent sur les douze représentations qui s’échelonnent entre le 24 juin et le 9 juillet –pour entre autres permettre aux solistes d’aborder un rôle différent de l’une à l’autre. C’est la seconde que nous avons entendue avec le Tamino plein d’innocence, quoiqu’un peu pâle et léger, de Jan Petryka, aux côtés de la Pamina colorée incarnée par Camille Dereux. Guillaume Andrieux affirme une belle franchise vocale, même si son Papageno à la diction soignée montre parfois plus de gaucherie que de naturel. Johannes Stermann affiche les graves solides exigés par le rôle de Sarastro. Caroline MacPhie, Heather Newhouse et Dorothea Spilger forment un joli trio de Dames tandis que les trois garçons se révèlent touchants par-delà l’imprécision de leur intonation. Mais c’est incontestablement l’agile et stratosphérique Reine de la Nuit de Sabine Devieilhe qui remporte la palme des suffrages, d’autant plus légitimement que la soprano française ne sacrifie jamais la tendresse du timbre sur l’autel de la virtuosité. On vous l’aura dit, cette Flûte enchante autant les yeux que les oreilles.

GC

La Flûte enchantée, Opéra de Lyon jusqu’au 9 juillet 2013

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