19 avril 2013
La féerie s’invite aux Invalides

Franchement, les sons et lumières, c’est souvent des commentaires neuneus qui accompagnent une débauche de projecteurs afin de vous en mettre plein la vue. Dans celui qui se tient aux Invalides-qui tient le nom des invalides de guerre qu’on y installa autrefois-autant dire que nous défions quiconque de ne pas être saisi par la beauté, la créativité et la magie des décors « lumineux » que parvient à plaquer dans la cour d’honneur Bruno Seiller avec un talent par ailleurs reconnu partout où il passe. Le Château de Versailles, Notre Dame, le viaduc de Millau, sa mise en « fresques lumineuses » est absolument irrésistible tant pour les conservateurs que pour le public. Alors bien sûr, il faisait un peu froid ce vendredi soir d’avril, les coussins manquaient sous les fesses mises à mal par les pavés de la Cour mais quelle merveille que le résultat de près de 4000 heures d’infographie pour parvenir à ces images projetées ô combien respectueuses de l’architecture parfaite du lieu.

De Louis XIV à de Gaulle

Il est 22 heures 30, la voix d’André Dussolier s’élève, les sons des fifres parcourent les coursives comme autrefois au crépuscule-signe que le bâtiment allait fermer. Les soixante ouvertures des toits conçues par l’architecte Louvois, tels des yeux ornés de sculptures, se mettent à « vivre », à « parler  » pour témoigner de cette époque où dominait  » l’art de rendre beau ce qui était utile »-en l’occurrence éclairer le grenier. Comme dans un musée, mais sans être scotché à son audiophone, les explications arrivent pour donner du sens à ce que l’on voit généralement sans voir. Les dessins, les couleurs sont d’un raffinement extrême, tantôt représentant la voie lactée, tantôt les éclairs. Le frontispice se transforme en orgue, les colonnes en touches de piano, la viole de Gambe de Marin Marais s’élève, Louis XIV est là, lui qui a souhaité cette enceinte aux proportions parfaites. De Versailles à la Bastille, les 20 000 fusils détenus ici serviront la révolution, le sang qui coule, le feu qui brûle puis le « Dieu de la guerre » qui arrive, Napoléon dont la statue qui fut repêchée en 1911 dans la Seine,  veille sur l’assemblée- à jamais. Les façades se couvrent  du vert et du rouge Empire et de Légions d’honneur, la première -à l’époque où cela voulait encore dire quelque chose- ayant été remise par l’Empereur ici même. Le récit se fait alors conte avec des soldats espiègles qui sautent sur les murs avant la page sombre des guerres de 14/18 et de 39/45. De Gaulle apparait alors sur la 7ème Symphonie de Beethoven, non sans émotion pour un hommage à la grandeur de la France qui résiste ou qui combat comme aujourd’hui en Afghanistan. « Les pauvres n’ont que la patrie » disait Jaurès, « que ces pierres leur appartiennent ( les enfants) à la condition qu’ils les aiment » ajoutait Malraux, voilà en tous cas un bel exemple de culture « vivante », moderne mais respectueuse avec des tarifs tout à fait raisonnables (12 euros, gratuit pour les moins de dix ans) à consommer sans modération jusqu’au 7 mai.

LM

Les nuits aux Invalides-spectacles à 21h15, 22h15 et 23h15, à coupler avec la visite du dôme, ouvert et mis en lumière spécialement pour l’événement

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