27 octobre 2012
Justice capitaliste

4,9 milliards à rembourser pour un seul homme. Grâce à un mécanisme fiscal, la Société Générale en a pourtant  déjà récupéré 1,7 milliards… Avec en plus trois ans de prison, Jérôme Kerviel pourra bien arpenter les plateaux de télévision, donnant du « pain et des jeux » aux médias et au public, personne n’aimerait aujourd’hui être à sa place. Les 10 secondes de célébrité promises à tous  par Andy Warhol ont chez lui un goût sans doute amer, d’autant qu’il n’y a pas eu en ce qui le concerne à proprement parler d’enrichissement personnel, mais plutôt un pétage de plomb, assez logique dans ce milieu totalement virtuel. La Cour d’Appel de Paris en considérant  que le trader a passé sur le marché « sciemment et à l’insu de son employeur » des ordres « d’un montant exorbitant, dépourvus de toute couverture » qui ont fait « courir pour son employeur des risques considérables » le condamne donc au maximum, semblant ignorer que différents services de la banque avaient déclenché « sur le périmètre de JK » (Jérôme Kerviel) deux alertes en 2006 et 46 en 2007 sans qu’elles n’entraînent de quelconques réactions de la hiérarchie.

Au service du capital

Et que c’est le principe même du trader que de prendre des positions risquées qui se révèlent le plus souvent juteuses pour les banques qui régulièrement jouent avec le diable! Dans ce procès aussi inique que celui qui opposa les victimes du Médiator aux laboratoire Servier, il semblerait ainsi que la justice ait choisit une fois encore le camp des plus forts, le capital.  Et pérennise le principe du bouc émissaire, ignorant apparemment le système ô combien implacablement décrit dans le film Margin Call, sorti en DVD ou Le Capital de Costa Gavras, au cinéma le 14 novembreDeux films qui plongent au coeur de ces établissements qui n’ont plus rien à voir avec les banques à papa et au nom des dividendes, n’hésitent pas à courir des risques démesurés pour lesquels elles jouissent d’une parfaite impunité. L’argent devenu valeur première n’a alors même plus de matérialité, confié à des mathématiciens qu’il finit par rendre fous. C’est ce qui est arrivé à Jérôme Kerviel qui en paie aujourd’hui un  prix d’une obscénité encore jamais vue dans le passé tandis que pas un de ses supérieurs n’a été inquiété ni même limogé. Sans doute dorment-ils cependant mal la nuit si tenté qu’ils aient encore une conscience. Elle doit être en tous cas bien noire…

Par Laetitia Monsacré

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