6 octobre 2011
Johnny à mi-chemin du paradis

Johnny Hallyday n’est pas schizophrène. Lorsqu’il est sur la scène du théâtre Edouard VII où il restait des places libres, c’est pour ne jouer que son rôle de Chicken, le métis bourru,  en mal d’amour de Paradis sur terre, pièce méconnue abordant le racisme de Tennesse Williams revisité par Bernard Murat. Concentré sur son texte au point de soulever une guitare sur la scène comme une vulgaire casserole et de ne  pouvoir une fois dans sa loge, se souvenir d’une de ses plus belles de ses chansons- il est vrai dont il n’a pas écrit les paroles- On a tous quelque chose en nous de Tennesse… »cette force qui nous pousse vers l’infini, y’a peu d’amour avec tellement d’envie, si peu d’amour avec tellement de bruit ».
Michel  Berger n’aurait pu mieux décrire ces êtres en perdition, les même que ceux d’Un tramway nommé désir , de la Chatte sur un toit brulant ou encore de Soudain l’été dernier. Alors bien sur les fantômes de Vivien Leigh, Elizabeth Taylor et Montgomery Clift viennent-ils roder dans nos souvenirs lorsque l’on est face à notre idole nationale et sa partenaire, Audrey Dana. Celle ci joue une Myrtle -adorable cruche- qui n’ a rien à envier dans la névrose à Blanche Dubois sauf que cela finira mieux pour elle. La comédienne -révélée par Claude Lelouch- est une fois  encore écrasante sur scène, ne laissant que des miettes à ses partenaires- Johnny y compris. Et ce n’est pas les applaudissements lorsqu’il entre en scène ou le début de standing ovation avant qu’il ne la quitte qui y changeront quelque chose. On ne se souviendra pas de lui comme d’un grand comédien dans les tirades demandant de l’émotion, mais parfaitement crédible dans l’action ; lorsque ça crie, que ça cogne, c’est là qu’il est lui, et donc bon. « Car une femme, il n’y a que deux façons de la calmer ; où on la cogne, ou on la baise. Et parfois, il faut faire les deux à la fois ». Dans ce registre, il est parfait et c’est pourquoi- contrairement à l’avis général des critiques, prouve qu’il peut avoir sa place sur scène pour jouer les gros durs, à presque 70 ans.

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