8 avril 2012
Fils de sang

Si Etienne Chatillez avait fait une comédie irrésistible d’un échange de bébé à la naissance dans « La vie est un long fleuve tranquille », Lorraine Lévy (soeur du producteur de  bestsellers, Marc Lévy) signe, avec la même idée, un beau film dur,  à l’image du drame que vivent quotidiennement ceux qui sont nés d’un mauvais côté du mur. Point de clivage social ici mais un gouffre identitaire -culturel, religieux et politique-puisque les nourrissons sont nés pendant l’évacuation d’un hôpital à Haïfa; l’un, juif, est rentré en Israël, dans la riche Tel Aviv, l’autre, arabe, dans les territoires occupés palestiniens. Alors quand Joseph, fils d’un militaire,  doit faire son service militaire de trois ans dans l’armée israëlienne et qu’il découvre qu’il est en fait arabe et donc potentiellement son propre ennemi, voilà qui donne forcément une dimension dramatique à l’histoire. « Tu veux dire que l’autre, c’est moi? que je vais devoir troquer ma kippa contre une ceinture d’explosifs? « . Drame identitaire, drame d’un peuple opprimé, le film est aussi plein d’espoir  avec cette idée que, pris en tant qu’individu, chacun est capable de générosité. La caméra est comme un témoin, discrète, les acteurs tous parfaits; les pères auront plus de mal que leurs femmes  surtout lorsqu’ils ne pourront s’empêcher de parler politique comme Saïd, merveilleux Khalifa Natour, ancien ingénieur condamné à réparer des voitures à cause de cette guerre qu’il voit comme la « destruction d’un peuple« – le sien. La réalisatrice aborde aussi en filigrane  la nation d’ « inné « avec ces deux fils, qui une fois leur réelle filiation retrouvée comprennent enfin pourquoi l’un pouvait aimer tant la musique et l’autre être attiré par la France. « Sa vie aurait pu être la mienne, alors je vais faire tout pour la réussir ». Le film qui montre parfaitement bien la vie dans les territoires occupés et la haine qui peut en résulter se conclut sur une belle note de fraternité, Lorraine lévy ayant fait le choix d’avoir des personnages généreux et intelligents. Cela n’est pas toujours vrai dans la réalité, mais qu’importe, voilà un beau film qui  incarne, avec talent,  les images des journaux télévisés.

 

LM

 

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