16 janvier 2013
Eloge burlesque de la tolérance

La sortie de ce film militant sur le droit à l’homosexualité ne pouvait pas tomber plus à propos, en cette période de mobilisation autour du mariage gay. Prix du Jury œcuménique, prix du public Berlinois et Prix Teddy Bear, voilà un bijou d’humour, travail d’un orfèvre du cinéma engagé. Après La Fanfare, le réalisateur et poète de Belgrade au nom imprononçable Srjan Dragojevic, nous offre une nouvelle comédie déjantée, pleine de sarcasmes et aux dialogues irrésistibles.
Un scénario burlesque et invraisemblable ? Lemon, un Goliath, fanatique d’armes aux tatouages aussi gros que sa croix, a la main mise sur les malfrats de Belgrade. Mais devant le chantage de sa fiancée, ce gangster homophobe, comme l’ensemble de ses fréquentations, va se retrouver forcé de mener la défense de la première Gay Pride Serbe. Ses collègues de judo s’étant désolidarisés de cette mission de « pédale », il part en quête de ses anciens camarades de front. Ces têtes patibulaires bosniaques, albanais, kosovars ou encore guerriers croates vont batailler sous le drapeau arc-en-ciel contre les skinheads. Choc des cultures et leçon de tolérance sans « bien-pensance » garantie,  hilarité garantie.

Du rire aux larmes

Reste que dans la Serbie de 2012, on frappe encore les hommes et les femmes ayant une orientation sexuelle différente et pas seulement dans les parcs, mais aussi dans les rues de Belgrade.
Le réalisateur, lui-même la cible de discriminations, montre l’indifférence du gouvernement, comme ce chef de police véreux dans le film, qui relate la vraie première Gay Pride de 2001 en Serbie. Laquelle s’est terminée en effusion de sang : une trentaine de militants homosexuels ont été brutalement battus par des hooligans et des néonazis « tandis que la police était postée juste là, ne faisant rien pour arrêter ce massacre » s’indigne le réalisateur. Mais le grand souffle du film, est sans doute cet élan d’humanisme qu’il véhicule. A l’écran, divers anciens criminels des Balkans, réalité de la richesse ethnique de la région qui, après les haines fratricides qui les ont opposés, s’unissent pour lutter contre l’homophobie. « Je crois fermement que La Parade aura un effet similaire sur la nation serbe. Ils vont crier, ils vont hurler mais ils vont regarder le film. Et quand ils le regarderont, peut-être vont-ils réfléchir et reconsidérer leurs préjugés et stéréotypes à l’égard de ceux dont la seule faute est d’être différents ».
Si Molière tentait en son siècle de corriger par ses comédies de mœurs, les vices par le rire « castigat ridendo mori »,  Srdjan Dragojevic s’inscrit dans ce rire cathartique, qui doit avoir un impact sur les spectateurs. Et même si le film finit par tourner un peu en rond et manque de finesse, surtout vers la fin, voilà une comédie qui vous fera rire de bon coeur et réflechir sur la tolérance…Pas mal, non?

Par Elodie Terrassin

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