1 février 2018
Du Bal Masqué à Jephta, faites vos jeux à l’Opéra de Paris!

 

Ce mercredi 31 janvier 2018, Sondra Radvanovsky assurait sa dernière représentation dans le rôle d’Amelia dans Le Bal Masqué de Verdi; elle y fut prodigieuse, confirmant qu’elle est est actuellement la plus grande interprète verdienne- elle a également ajouté à sa voix de soprane le rôle de Norma de Bellini , de Tosca de Puccini ainsi que ce mois de janvier celui de Paolina dans Poliuto de Donizetti au Gran Teatre del Liceu à Barcelone. Cet opéra en trois actes créé en 1859 par Verdi est pourtant une pure merveille; on pense à La Traviata lorsque résonne le duo de l’Acte II qui unit Riccardo, le gouverneur de la ville de Boston, à Amélia, femme de son conseiller et ami Renato, interprétés respectivement, et avec le même bonheur que Sondra Radvanoski, par le ténor italien Piero Pretti tandis que le baryton Simone Piazzola apparait malheureusement un peu faible, comme le confirme les faibles applaudissements lors du salut final. La mise en scène créée en 2007 par le belge Gilbert Deflo est sobre avec un décor qui passe d’un aigle blanc aux ailes déployées à ceux, montrés de dos et noir corbeau dans le tableau du solo d’Amélia  » Ecco l’orrido campo «  où la soprano américano-canadienne née en 1969 subjugue le public de Bastille avec ses aigus percutants et ses graves opulents. Il faut dire que le livret d’Augustin-Eugène Scribe est exceptionnel; « Et si je devais périr? Périr! Eh bien si tel est mon devoir, telle ma destinée, qu’ils s’accomplissent! (…)Que va-t’il te rester, si l’amour passe…Que va -t’il te rester, mon pauvre coeur! Ah, qui pleure, quelle force me repousse Et l’arrête sur ce chemin sinistre? Va courage…Et toi, deviens de pierre, ne me trahis pas, arrête de gémir; ou bien cesse de battre et meurs, Disparais, mon pauvre coeur! ». Enfin, il convient de souligner la prestation époustouflante de la soprano arménienne  Nina Minasyan dans le rôle d’Oscar, véritable rossignol, ovationnée par le public. Une magnifique soirée, bien loin de celle donnée à Garnier ce même mois avec  Jephta, un oratorio en anglais et en trois actes d’Haendel créé en 1752.

Jephta à Garnier, à mourir d’ennui

William Christie, maître incontesté de la musique baroque y dirige avec son brio habituel son orchestre des Arts Florissants. La contre alto belge Marie-Nicole Lemieux est comme à son habitude impeccable dans son art de la déclamation dans le rôle de Storgè. Mais quel ennui que cette nouvelle création mise en scène par  Claus Guth, d’ailleurs hué le soir de la première. C’est simple, il ne se passe rien sur scène. Des lettres qui passent, des petits nuages qui se ballade, on n’est pas loin d’une version concert, avec pour seule échappatoire celle de poser son regard sur William Christie et sa façon unique et déroutante de précision pour diriger son orchestre. Ou bien peut-on chercher- pour les spectateurs assis aux premiers rangs du parterre- dans la fosse et capter la ferveur qui y règne comme chez cette violoniste au sourire constant et habité. Car, soyons francs, le livret de l’Anglais Thomas Morell sur un sujet biblique s’inspirant de Jephté, personnage du Livre des Juges qui, parce qu’il a fait vœu de sacrifier la première créature qu’il croisera à son retour de guerre en cas de victoire, se voit contraint d’immoler sa propre fille, est très loin du bonheur que peut donner Ariodante, drama per musica créé par Haendel dix sept plus tôt que Jephta, donné en mars dernier en version concert au Théâtre des Champs Elysées- lire article. Bref,vous l’aurez compris entre Bastille et Garnier, ce mois de janvier, il fallait miser sur le bon numéro!

Par Laetitia Monsacré

Le Bal Masqué de Verdi à l’Opéra Bastille jusqu’au 10 février 2018

Jephta de Haendel à l’Opéra Garnier jusqu’au 30 janvier 2018

Le salut final avec Sondra Radvanovski entourée de Piero Pretti et  Simone Piazzola 

 

Le Prélude d’Amélia « Voici l’horrible plaine où le crime avec la mort s’accouple » de l’Acte II chanté par Sondra Radvanovsky

Le duo entre Amélia et Riccardo dans une version donnée en 2012 au Bolchoï de Moscou

Sarah Veysset dans l’air d’Oscar, « Volta la terra » 

Articles similaires