17 janvier 2012
De la musique avant toute chose

En ces temps de vœux et de bonnes résolutions, the Melomaner va vous aider à remplir l’agenda que l’on vous a offert pendant les fêtes. Les saisons lyriques ne coïncidant hélas pas avec le calendrier civil, nous nous arrêterons donc au seuil de l’été, avec un bref aperçu sur les grands festivals – rassurez-vous, nous y reviendrons avant que vous ne prépariez vos valises pour le chant des cigales.
D’ici là, le grand rendez-vous de ce mois de janvier est la venue annuelle de Natalie Dessay à l’Opéra de Paris ; après La Somnambule il y a deux ans, et Giulio Cesare la saison passée, la diva française aux aigus stratosphériques incarnera la coquette Manon de Massenet sur la scène de Bastille, ouvrant le bal des commémorations du centenaire de la mort du compositeur français.

Carsen et Sellars

De l’autre coté des Alpes, vous aurez rendez vous avec Richard III de Battistelli au Grand-Théâtre de Genève, création importée de Flandres, dans une mise en scène forcément efficace de Robert Carsen – du 22 janvier au 1er février. Une centaine de kilomètres à l’ouest, et quelques jours plus tard, l’Opéra de Lyon met en regard, sur trois soirées, les trois opéras en un acte du Triptyque de Puccini, avec trois ouvrages du vingtième siècle traitant du même sujet. Une passionnante mise en perspective, mise sur les planches par David Pountney du 27 janvier au 13 février. Hors de nos frontières, l’évènement a lieu au Teatro Real de Madrid dans un doublet russe réglé par Peter Sellars : Perséphone de Stravinsky et Iolanta de Tchaïkovski, du 14 au 29 janvier.

Le début du mois de février sera lui, placé sous le signe de la danse, avec le retour de la vision essentielle laissée par Pina Bausch du mythe d’Orphée et Eurydice – au Palais Garnier du 4 au 16 février – tandis qu’Andonis Foniadakis créera une nouvelle chorégraphie sur une musique de Haendel  du 4 au 12 février au Grand Théâtre de Genève. On pourra saluer le pays de Vaud à l’occasion de l’Alcina dirigée par Ottavio Dantone – à Lausanne du 19 au 26 février.

Du baroque et de l’opéra bouffe

Mais c’est de l’autre côté du Rhin qu’il faudra porter les regards, avec l’incarnation magistrale d’Edita Gruberova dans le Roberto Devereux que Christof Loy lui a taillé sur mesure à Munich du 1er au 13 février,  et surtout une Ariane à Naxos de grand luxe à Baden-Baden, avec Renée Fleming, Sophie Koch, dirigée par Christian Thielemann du 18 au 25. Paris ne sera pas en reste avec l’Egisto de Cavalli par le désormais célèbre duo Vincent Dumestre/Benjamin Lazar à l’Opéra Comique du 1er au 9 février – avec des séances de rattrapage à Rouen, du 16 au 19, et en fin de mois, à l’Amphithéâtre Bastille, les deux essais inachevés de Debussy en matière lyrique, d’après Poe -Le  Diable dans le Beffroi et La Chute de la maison Usher, du 29 février au 3 mars, en parallèle à la reprise dans la grande salle du Pelléas et Mélisande de Debussy dans la mise en scène de Robert Wilson du 28 février au 16 mars.

C’est encore dans l’est que ça se passera en mars, avec à Strasbourg, Les Huguenots de Meyerbeer, venus de Bruxelles, dans la mise en scène d’Olivier Py, du 14 au 28 mars. En Lorraine, l’Opéra de Nancy programmera la géniale satire de Jean Michel Ribes, René l’Enervé, opéra bouffe se moquant ouvertement de Nicolas Sarkozy et qui avait fait l’ouverture de la saison du Théâtre du Rond-Point – du 14 au 18 mars. A Lyon encore, la nouvelle production de Parsifal commandée à François Girard et dirigé par l’excellent Kazushi Ono réunira les mélomanes, et pas seulement les wagnériens patentés – du 6 au 25 mars. On pourra aussi se déplacer à Lille pour un Couronnement de Poppée mis en scène par Jean-François Sivadier, avec Emmanuelle Haïm au pupitre et Max-Emanuel Cencic en Néron – du 12 au 22, ou encore à Dijon, les 1er et 3 avril. Les nostalgiques, quant à eux, pourront saluer Grace Bumbry au Théâtre du Châtelet le 6 mars.

Petibon et Gens, deux belles en scène

Mais l’évenement pourrait bien venir de l’Opéra Bastille avec le Don Giovanni de Mozart revisité par le résolument moderne et controversé cinéaste Michael Haneke, du 15 mars au 21 avril qui reunira Patricia Petibon et Véronique Gens -excusez du peu…
Avril, direction Metz, avec une création de Suzanne Giraud mettant en scène la vie sulfureuse de Caravaggio, avec un plateau réunissant rien de moins que Philippe Jarrousky et Maria Riccarda Wesserling -les 13 et 14 avril. A Paris, le mois est plutôt dense. Au Théâtre du Châtelet, l’histoire récente fait une incursion dans la naphtaline de l’opéra avec Nixon in China de John Adams du 10 au 18. A l’Opéra Comique, on remet au goût du jour un opéra mythique du dix-neuvième siècle, La Muette de Portici – c’est sur l’un des chœurs de cet ouvrage d’Auber que s’est déclenché la révolte pour l’indépendance de la Belgique – du 5 au 15. Avenue Montaigne, William Christie et Clément Hervieu-Léger donnent la Didone de Cavalli, du 12 au 20 au Théâtre des Champs Elysées. On n’oubliera pas de rendre visite à nos voisins berlinois : le Deutsche Oper donne, du 20 au 30 avril, Rienzi, un opéra de jeunesse de Wagner trop souvent mésestimé. Et pourquoi ne pas en profiter pour aller à la Philharmonie entendre le prodige vénézuélien Gustavo Dudamel diriger Ravel, Strauss et Golijov ?

Printemps en beauté

Mais voilà mai,  à nouveau de la danse à l’Opéra de Paris avec tout d’abord, le Roméo et Juliette sous l’épure de Sacha Waltz, mais avant tout pour la sublimissime musique de Berlioz – à l’Opéra Bastille du 7 au 20. A Garnier, c’est le Japon de Maurice Béjart que l’on célèbre, avec Kabuki, du 18 au 22. Au Théâtre des Champs Elysées, le talentueux Jérémie Rhorer, célébré en ces colonnes pour son Amadis de Gaule versaillais, dirige le Cosi fan tutte réglé par Eric Génovèse, sociétaire de la comédie française – du 22 au 31. Ayant demandé des délais supplémentaires pour la révision de son travail, Marco Stroppa créera enfin son Re Orso à l’Opéra Comique, du 19 au 22 mai, avec l’aide de la technologie de l’Ircam. A Strasbourg, Lucinda Childs mettra en scène le Farnace de Vivaldi, dirigé par Diego Fasolis – du 18 au 26. Pour du soleil – normalement – garanti, direction Barcelone et le Liceu avec l’Adrienne Lecouvreur de David McVicar avant qu’elle n’arrive à Paris la saison prochaine – du 14 mai au 3 juin. Poussez un peu vers l’ouest, jusqu’à l’embouchure du Tage, et allez au Sao Carlo de Lisbonne voir le diptyque réunissant Francesca da Rimini de Rachmaninov et la Turandot de Busoni – du 19 au 27 mai.

Les évènements se bousculeront en ce mois de juin sur la scène de l’Opéra de Paris. Ivan Alexandre viendra régler Hyppolite et Aricie de Rameau à Garnier, du 9 juin au 9 juillet, tandis que Renée Fleming déploiera sa voix capiteuse dans Arabella de Richard Strauss sur les planches de la Bastille, du 14 juin au 10 juillet. Vous prendrez le train pour la côte Atlantique et irez au Grand-Théâtre de Bordeaux voir les Noces de Figaro d’une figure du théâtre en Aquitaine, Laurent Laffargue, ainsi que la reprise d’un Don Giovanni qui avait beaucoup divisé en 2002 – du 13 au 24 juin.

Pour aller jusqu’à l’été

Côté mise en scène dérangeante, direction Genève pour le Macbeth de Verdi revu par Christof Loy – du 13 au 26 juin. On vous recommandera également le Tueur de mots de Claudio Ambrosini à Nancy, sur un livret de Daniel Pennac – du 26 juin au 3 juillet. Et vous n’oublierez évidemment pas la Carmen d’Olivier Py à Lyon, du 25 juin au 11 juillet. En Europe, le Teatro Real de Madrid donnera une réécriture de Monteverdi par le compositeur belge Philippe Boesmans, Poppea e Nerone, mis en scène par Krzysztof Warlikowski – du 12 au 30 juin. Mais le grand évènement lyrique de cette fin de saison, c’est à Londres, à Covent Garden, qu’il faudra aller le chercher : Les Troyens de Berlioz, mis en scène par David Mc Vicar, et chantés, entre autres, par Jonas Kaufmann et Eva-Maria Westbroek, du 25 juin au 11 juillet.

Et nous voilà donc en été, avec ses festivals  dont il est encore un peu tôt pour dresser une liste exhaustive de vacances intelligentes. Evoquons cependant dès à présent le festival d’Aix-en-Provence, qui se tiendra comme chaque année en juillet, avec deux Mozart, Les Noces de Figaro et La Finta Giardiniera, Davis et Jonathan de Charpentier, L’Enfant et les Sortilèges de Ravel et une création de George Benjamin. En août, les amateurs fortunés  fileront vers Salzbourg, ou Lucerne, au bord du Lac des Quatre Cantons. Mais on vous reparlera de tout cela quand il fera un peu moins froid…

Par Gilles Moiné Charassier

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