25 novembre 2017
La création musicale se donne à voir à Perpignan

Chaque année au mois de novembre depuis plus d’un quart de siècle, la création musicale et visuelle contemporaine, sous toutes ses formes, est à l’honneur à Aujourd’hui musiques à Perpignan, avec un souci constant de ne pas l’enfermer dans un ghetto. Cette ambition d’ouverture, qui dispose, avec le Théâtre de l’Archipel depuis 2011 d’un outil remarquable, se vérifie dans le cru 2017. Si cette vingt-sixième édition s’ouvre avec le format plutôt classique d’un concert consacré à l’un des compositeurs emblématiques du minimalisme américain, et qui vient d’avoir quatre-vingt ans, Philip Glass, la programmation mêle une grande diversité de genres. On retiendra ainsi une relecture électro de Hamlet par Wilfried Wendling, proposé samedi 18 en création mondiale avant de tourner en région parisienne au mois de décembre, un duo entre piano et électronique avec Vanessa Wagner et Murcof le mercredi suivant, une performance multimédia, Crossing Points, de Philippe Spiesser avec Pierre Jodlowski, jeudi 23. Ce dernier revient le samedi 25 aux côtés des Percussions de Strasbourg pour Ghostlost, croisant théâtre et musique, avant une clôture sous le signe du cirque.

Du cirque à l’électro

C’est d’ailleurs dans sa version « électro et minérale » que le genre circassien s’invite dans la salle du Carré mardi 21, au lendemain d’une séance pour les scolaires. Dans Masse critique, les quatre comparses de la compagnie Lonely Circus défient un matériau rarement associé à l’acrobatie : la pierre. On les découvre d’abord juchés sur un muret de cailloux qu’ils déconstruisent et reconstruisent au fil de prudentes permutations suscitant quelques sourires et rires de jeunes spectateurs, avant de se livrer à une manutention de lourds galets pour esquisser une sorte de résumé de l’épopée humaine, qui se referme sur une interrogation sur le territoire, notre planète menacée de ne plus être habitable. On ne peut que mesurer combien le concept de Sébastien Le Guen relève de la gageure, et d’abord physique, mais les interactions avec la création sonore, due à Jonathan Fenez et Jérôme Hofman, un peu rudimentaires, au diapason de la pierre sans doute, laisse passablement sur sa faim qui attendrait davantage d’effets.
Mais le festival ne se limite pas aux spectacles du soir, et le public est également convié à découvrir, en apéritif dans la verrière de l’entrée, un concert ou une performance d’une demi-heure : ce mardi un récital au piano de François-Michel Rignol croisant Bach et Glass, tandis qu’en sortant il verra garée une Smart noire, où Roland Auzet réalisera les deux jours suivants un concert en voiture. L’association du visuel et du musical s’exprime encore dans l’installation Image latente imaginée par Alexandre Réty pour la petite salle du Studio pendant presque une semaine : autour d’un faisceau d’eau et de lumière qui y dessine des motifs géométriques sur un puissant fond électroacoustique, on est invités à se mouvoir pour tour à tour s’immerger dans la fraîcheur du flux lumineux, ou en lire le résultat presque cinématographique sur un mur comme sur un écran noir. Assurément, l’inventivité visuelle et sonore n’est pas un vain mot à Aujourd’hui musiques.

Par Gilles Charlassier

Festival Aujourd’hui musiques, Perpignan, novembre 2017

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