27 janvier 2014
Comme des rats

AzhyyjdCcAEkNFD.jpg_large

En 1870, on mangeait des rats à Paris, les chats ayant déjà fini tous dans les estomacs d’ une population affamée et assiégée par les Prussiens. En 2014, c’est dans les zones contrôlées par les rebelles syriens que les civils sont condamnés à se nourrir de rongeurs, pris au piège avec eux dans les villes que l’armée de leur propre président, Bachar El-Assad, assiège. Voir le documentaire Return to Homs ( lire article), qui a obtenu ce week-end le grand prix du jury à Sundance (et sera diffusé sur Arte le 4 mars à 20 h50), donne une idée effrayante de ce qu’est être pris dans cette nasse, affamé depuis 500 jours et réduit à se terrer en priant qu’un obus ou un sniper ne vous tue pas.« Bassat est encore là-bas et les civils aussi » répondit le réalisateur syrien Talal Derki à un Américain dans le public qui lui demandait, à l’issue de la projection, où en était la ville un an après les images filmées. A une autre qui l’interrogeait pour savoir s’il espérait quelque chose de Genève II, il fit part de son doute. Doute qu’en une semaine, on parvienne à trouver une solution à un conflit qui, en deux ans et demi, a déjà fait plus de 130 000 morts, 2,3 millions d’exilés et 9,3 millions de civils qui, selon les Nations-Unies, ont besoin d’une aide humanitaire à l’intérieur du pays. Pourtant ce dimanche,  l’opposant Louai Safi a obtenu que les femmes et les enfants – environ 500 familles puissent enfin sortir des quartiers rebelles assiégés et dévastés de Homs, un test et un symbole dans cette ville martyre où les premières manifestations pacifiques en 2011 ont lancé cette révolution au nom de laquelle plus de 45 000 civils sont morts.

Un mort bien vivant

Homs n’est malheureusement pas la seule à souffrir comme lorsque jeudi dernier, 63 personnes, dont des femmes et des enfants, sont morts dans le camp palestinien de Yarmouk, au sud de Damas,  en raison de la pénurie de nourriture et d’un manque de soins médicaux, le résultat une fois encore du siège meurtrier de l’armée de Bachar el-Assad. « La meilleure chose pour un mort est de l’enterrer » a affirmé l’opposition qui refuse en ce début de négociation tout régime de transition avec celui qui, grâce aux Russes, se maintient encore à la tête d’un pays exsangue. Comment pourrait-elle en effet l’accepter? A voir les hommes qui se battent sur le terrain comme ce fascinant Bassat dans Return to Homs, le radicalisme et le courage qui l’animent, on devine que Genève ne pourra accoucher que d’une souris. Et confirmer, ne serait-ce au niveau des journalistes pro-régime ou pro-opposition qui, sur place en viennent quasiment aux mains, que seul le départ de Bachar El-Assad pourra donner une chance à la paix. Puisse 2014 voir cela…

Par Laetitia Monsacré

Articles similaires