8 décembre 2012
Cité de la musique/ Django Génie

« Votre rythme secoue le malaise universel », écrivit l’illustre Cocteau au grand Django. Artiste de génie qui donna son nom au jazz manouche et premier soliste majeur européen, Django Reinhardt révolutionna le jazz par des effets d’attaque et de distorsion totalement inédits. La Cité de la Musique rend aujourd’hui hommage à celui qui inscrivit son histoire à celle de Paris, et dont la popularité ne s’est jamais démentie. Cet enfant de la balle né à l’arrière d’une roulotte itinérante le 23 janvier 1910, s’initie très jeune au violon avant d’adopter la guitare. Pourtant dépourvu de l’usage de deux doigts de la main gauche, à la suite de l’incendie de sa roulotte en 1928, le petit génie de la musique se fera remarquer par l’originalité de son jeu qui lui vaudra d’être engagé dans l’orchestre du Palm Beach à Cannes. C’est en 1934 que Django fera la connaissance de Stéphane Grappelli, avec qui il fondera le Quintette Hot Club de France, exclusivement composé d’instruments à cordes. Sous l’Occupation, le swing devient l’étendard de toute une jeunesse frondeuse, les « zazous », dont le Nuage de Django fait  figure emblématique. Il part ensuite conquérir les Etats-Unis en 1946 aux côtés de Duke Ellington. Mais il peine à retrouver sa notoriété d’avant guerre à son retour en France et décide alors de se consacrer à la peinture et à son fils. En 1951, après plusieurs mois d’absence, il est engagé au Club Saint- Germain accompagné de musiciens férus de be-bop. En allant au-delà des barrières de classes et des normes sociales, l’artiste sut conquérir, tout au long de sa carrière, aussi bien les intellectuels férus de jazz que les danseurs des bals canailles. Le swing manouche connait aujourd’hui un fort engouement avec des artistes tels que Birélie Lagrène, Thomas Dutronc, ou encore Sansévérino.

Jazz à tous les étages !

L’exposition se devait d’être à la hauteur du génie de l’artiste. Pari réussi avec une scénographie, originale et sophistiquée, de Patrick Bouchain qui confère à l’exposition un esprit de liberté grâce à l’absence de mur, et à de grandes tables creuses où foisonnent documents en tout genre. Le visiteur déambule dans un univers chaleureux et convivial organisé en sept thématiques retraçant la vie du musicien. Les supports sont multiples et variés : affiches, instruments, partitions, photographies -quel bonheur de contempler Django aux côtés de Fred Astaire, Coleman Hawkins, ou encore Dizzy Gillespie ! L’occasion de découvrir des documents rares tels que les peintures de Django, et des partitions manuscrites originales, notamment celles de la Messe pour les romanichels. Car si le ton se veut léger, il est également historique, l’occasion de rappeler que des déportations de nomades étaient organisées par le régime de Vichy dès 1940. On apprend également que l’artiste s’était lancé dans une pièce symphonique, Manoir de mes rêves. Le clou de l’exposition vient de la présentation de la guitare Selmer (instrument emblématique du jazz manouche) numéro 503, que Django Reinhardt  utilisa jusqu’à la fin de sa vie. Des points sonores jalonnent le cheminement des visiteurs : écoutes au casque, bancs sonores. Des minis concerts sont, en outre, organisés les vendredis et samedis soirs pour un voyage en terre manouche que vous ne manquerez pas d’apprécier…

Par Laura Baudier

Django Reinhardt, swing de Paris-Cité de la Musique, jusqu’au 23 janvier 2013

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