10 juillet 2015
Avignon, côté off

photo 2-1

Après un début caniculaire, le mistral s’est levé sur la ville d’Avignon. Des centaines d’affiches se sont abattues dans les rues, autant d’invitations qui finissent dans les poubelles à aller voir l’ une des 1387 pièces données dans ce off qui fête ses 50 ans. Et transforme chaque mois de juillet la ville en cour des miracles. Le synopsis dans le lourd catalogue-près de 400 pages, les flyers donnés par des troupes qui cherchent à remplir leur salle avec un argument de poids lorsqu’elle est climatisée, les critiques de la presse pour les spectacles qui reviennent d’une année sur l’autre, le bouche à oreille, rien n’y fait, il faut accepter dans ce gigantesque supermarché de se tromper; de se retrouver embarqué une heure et quart- rarement plus longtemps- dans un voyage dont la destination correspond bien peu à l’ébauche de promesse faite. Camus, Molière, Musset, Shakespeare et tant d’autres sont ici « réinventés » par des compagnies de façon plus ou moins heureuse et les « seuls en scène » abondent  pour le bonheur de certains spectateurs qui riront bien volontiers tandis que d’autres passeront toute la représentation d’une fesse sur l’autre confirmant que l’inconfort de certaines salles devient difficilement supportable lorsque la pièce manque sa cible.

Le public du off est en effet bien souvent un cobaye, qui se doit d’être à l’heure, la taille des salles n’admettant aucune entrée tardive sous peine de gêner les acteurs. Cette même taille réduite qui oblige  à rester jusqu’à la fin même si vous avez tiré le mauvais numéro, avec un investissement n’excédant toutefois jamais 16 euros. Alors que voir? A la Condition des soies, Réparer les vivants, adaptation du magnifique livre éponyme de Maylis de Kerandal  illumine cette édition, avec Paris qui s’annonce pour la rentrée. Présente depuis plus de trente ans sur le festival, Pierrette Dupoyet incarne, au Théâtre Buffon, Louise Jaurès avec justesse pour rappeler que l’assassin de son mari, Jean Jaurès, ce génie humaniste « sorti premier de Normale sup devant Bergson », fut tout simplement acquitté dans Jaurès assassiné deux fois . Au Théâtre du coin de la lune, Caroline Loeb retrouve avec une belle générosité George Sand dont on écrivit sur l’acte de décès « sans profession », confirmant que les femmes doivent lutter toujours et encore à l’image du trio virulent de King Kong théorie de Virginie Despentes qui, entre viol et prostitution, tire à vue sur la condition féminine devant une salle comble où les spectateurs masculins semblaient bien embarrassés. Valeurs sûres, L’affaire Dussaert, Le pianiste aux cinquante doigts, Parce que c’était lui confirment leur succès ô combien mérité à Paris, avec cette idée que la capitale est une bonne « passoire ». Mais, il est vrai, l’ambiance en moins de ce dédale de ruelles où l’on ne cesse de se perdre et des restaurants de cette cité des Papes où l’assiette, elle, n’est jamais décevante.

LM

Festival du off, du 4 au 26 juillet 2015, site officiel

Articles similaires