12 mars 2012
Quai Branly/ Patagonie: au bout du monde

Patagonie, contrée lointaine et désolée. Terre mythique et enchanteresse. C’est cet univers mystérieux que présente la dernière exposition « Images du bout du monde » au Quai Branly. Un petit parcours agréable et instructif. La Patagonie a toujours fait parler d’elle comme d’un territoire mystérieux –entre Rio Grande et Argentine se prolongeant jusqu’au Cap Horn. A l’époque nos ancêtres ont cherché à la conquérir, aujourd’hui elle reste une source d’inspiration pour les photographes. Comme pour Hugo Aveta, dont les magnifiques clichés débutent le parcours de l’exposition. De ces paysages aux sommets enneigés baignés de nuages vaporeux, où l’air frais est pur, à son plateau désertique et son panorama à couper le souffle. Déjà nos aïeuls la racontaient comme un territoire sauvage aux contours flous. Les premiers témoignages illustrés par les cartes géographiques datent de 1525, au moment où l’Italien Antonio Pigafetta a livré son récit du tour de monde de Magellan. C’est amusant de voir que des dessins de monstres ou de caricatures illustrent les cartes représentant ces régions du Nouveau Monde. Il n’y a pas de frontière entre la science et les croyances, la fiction et le réel. De retour de leurs voyages, les explorateurs renforcèrent le mythe d’une terre sauvage peuplée par des géants. Peut-être que rentrer dans son pays en racontant avoir croisé des hommes de trois mètres de haut était plus glorieux ? En tout cas, les extraits des manuscrits qui suivent au fil de l’exposition comme des années passées à explorer cette terre mythique témoignent de l’infime frontière entre le réel et l’imaginaire. Le nom de Patagonie tiré lui-même d’un roman de chevalerie du XVIeme siècle, « Primaléon », résonne encore comme un fantasme de notre imagination.

Retour aux sources

Comme chaque terre découverte par les Occidentaux, elles se transforment ensuite en une conquête du territoire sans merci où les autochtones –après avoir fait l’objet de curiosités- sont étudiés et ramenés dans les capitales européennes pour être exhibés –le Quai Branly y a consacré l’exposition « Exhibition du sauvage ». Et ce nouveau territoire exploitable devient alors le lieu du massacre génocidaire des Indiens, au détriment des chercheurs d’or et des éleveurs de moutons venus par bateaux. Quelques photographies jaunies par le temps témoignent du dédain des hommes blancs, se tenant armés de leur fusil, à côté des cadavres nus des Indiens. Le mythe laisse place à la réalité- qui évoluera au cours des siècles. Une quarantaine de clichés exposés pour la première fois montre le rituel initiatique de la cérémonie du Hain, photographiée par le premier anthropologue à avoir pu observer la tribu Kawésquar et Selk’Nam. Un retour aux sources. Comme celui des photographies contemporaines qui sacralisent la beauté de la nature patagonienne. Des étendues inhabitées de la Terre de feu, à ses montagnes en passant par la fosse muraille naturelle –en la voyant un voyageur a pensé avoir découvert la frontière de l’Eldorado. Jules Verne avait raison de dire que « tout est extrême en Patagonie, les paysages, le climat, orageux et très froid et les sentiments qu’elle inspire : inoubliable. On est au bout de la route ».

 

Par Sarah Vernhes

 

Exposition « Patagonie », au Quai Branly jusqu’au 13 mai

 

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