6 juillet 2012
Amanda Sthers/ La filiation douloureuse

Amanda Sthers est souvent dans les pages people ou invitée sur les plateaux de télé. De quoi la rendre suspecte dans le monde des écrivains où l’on se plait à rester incompris et par conséquent ignoré. Or, c’est une très belle écriture que la sienne et un livre sur sa mère qu’elle livre avec Rompre le charme. Pas facile pourtant de venir après Delphine de Vigan et son remarquable Rien ne s’oppose à la nuit. Oui, mais voilà, Viviane fait elle aussi partie de ces mères qui ont enfanté des filles qui n’ont pu faire autrement que décrire, écrire ce que fut leur mère-celle qui les porta neuf mois puis les années ensuite, à grandir auprès d’elles,  plus ou moins facilement. A six ans, la mère d’Amanda Sthers est morte. Oh pas réellement. Une autre femme a juste pris sa place « qui avait presque la même tête, la même odeur, qu’on me désignait sous le nom de maman ». Une ombre depuis que son frère schizophrène, Benoît s’est suicidé. C’est justement lui qui revient hanter Amanda la nuit et l’oblige à « rompre le charme », comme un mauvais esprit dans cette famille qui « n’a pas des chagrins raisonnables » attachée à la tradition malgache pour conjurer le sort. Car il s’est acharné sur cette mère qui a soudain quitté leur père, se battant avec lui un soir de garde devant l’école, chacun tirant le bras de ses trois enfants qu’ils avaient cru pouvoir élever loin des tourments. « Les esprits ont du se régaler à nous pourrir les années à venir » Alors Amanda Sthers a choisi d’écrire, faire parler sa mère « que le pus sorte » et « se battre à coups de plume contre le poids des silences maudits ». L’enfance à Madagascar, ses rites mortuaires, mais également toute une définition de ce qu’être écrivain « apprendre à écrire le silence et laisser le bruit de la vie des gens entrer dedans. »Alors l’on découvre au fil des pages de ce beau livre, une « fille en chantier » dont « un des constructeurs est mort avant les finitions » et qui grâce à ce septième livre- tout un symbole pour elle-a sans doute réussi à se libérer de cet oncle et nous offrir avec pudeur et force un tableau sans concession de ces constellations familiales qui pèsent sur chacun de nous.

LM

Rompre le charme chez Stock-16, 50 euros

 

 

 

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