24 février 2016

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Chicago 1966. Vivian Meier est dans la rue. Avec son Rolleiflex, elle invente le selfie avant l’heure, en se reflétant elle même dans la vitre d’une voiture pour saisir ce chat  qui aimerait bien en sortir. Il montre ses dents fines, entre colère et résignation d’être enfermé, otage de cette prison de tôle, bien plus vivant que nombre des fantômes que l’on croise sur les trottoirs sales et défoncés de New York. En ce mois de février 2016, Manhattan comme tous les soirs de l’année ne dormira pas; les sirènes, le bruit des conduits d’aération, les dollars continueront à s’échanger dans les deli ouverts 24 heures sur 24 heures pour que surtout personne ne prenne le temps de se demander le sens de tout cela. Est-ce ainsi que les hommes vivent?  Des cohortes d’hommes et de femmes semblent y accomplir leur chemin de vie, l’oeil las, le portable à la main pour ne plus jamais n’être qu’avec eux-même, ne cessant de manger, d’acheter. Et de marcher, minuscules fourmis semblant prises au piège dans le quadrillage des rues et des avenues.

Accélération du temps, pour s’extirper de la foule, certains sautent dans un taxi et dévalent la ville, vers son haut, vers son bas dans une course aveugle qui semble sans fin. Une ville tachycarde au bord de l’infarctus, prête à sombrer à tout moment dans la folie où le temps parfois suspend son vol comme dans cette légendaire salle de Carnegie Hall lorsque la main droite du pianiste hongrois Adam Gyorgy s’élève au dessus du clavier tel un coléoptère pour exécuter avec virtuosité La Campanella que Paganini a inspiré à Liszt un dimanche après-midi.

Jim le Pariser était à New York, vous pourrez lire dans notre newsletter de samedi comment les selfies volent désormais  la vedette à Madame Butterfly dans la salle du MET ou comment les immeubles ne cessent de s’y élever à l’image de ce nouveau Whitney Museum imaginé par Renzo Piano dans un downtown en pleine gentrification. Bonne semaine d’ici là…

LM

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