21 novembre 2011

Vingt heures, soir de première au Grand-Théâtre de Genève (sur les bords du Léman, les spectacles lyriques commencent une demi-heure plus tard qu’à Paris). Les derniers spectateurs s’empressent de rejoindre leur place, vêtus d’un costume et d’une robe raffinée, ou bien d’une élégance plus décontractée ou insolite. Un coup de canon retentit et c’est l’ouverture de l’Enlèvement au Sérail qui fait retentir ses cloches de janissaires – le siège de Vienne par les Ottomans au siècle précédent avait légué un riche patrimoine d’exotisme musical dans lequel Mozart, à l’instar de ses confrères, a généreusement puisé. Belmonte, en smoking blanc et un dispositif explosif à retardement en mains, s’apprête à forcer la garde d’Osmin, pour aller délivrer Constance, sa bien-aimée, enlevée par Sélim pour son harem, ainsi que Blonde et Pedrillo, dame de compagnie et valet du couple. Osmin, assis devant les caméras de vidéosurveillance, fait le guet. Un instant, l’image s’arrête sur un bras caressant un chat – Sélim, Docteur Gang ? La succession de gags et de clins d’œil remet habilement les turqueries de l’ouvrage au goût du jour et stimule les zygomatiques de l’assistance. Mais la mise en scène de Mira Bartov se relâche prématurément, faute d’une direction d’acteurs inventive, de même que l’attention de l’assistance, accompagnée par la nonchalance de la battue de Jonathan Darlington. Il reste le plafond semé de cratères et d’étoiles à contempler. Une pause et un acte plus tard, gens de presse et de la maison sont conviés à des agapes conviviales dans le grand foyer, donnant sur la place De Neuve. Suivant un rituel établi, Tobias Richter, le directeur de la maison, prononce une allocution pour féliciter l’ensemble des artistes et rappeler la malédiction qui a frappé le rôle de Blonde. Olga Peretyatko, estimant sa voix désormais plus faite pour le belcanto que le singspiel mozartien, a révoqué son engagement. Teodora Gheorghiu (aucun lien avec Angela), alors prévue pour la remplacer, a dû annuler pour cause de maladie. Heureusement Rachele Gilmore, déjà connue des Genevois, sauve la soirée avec panache – pour les autres soirées ce sera Joanna Mongiardo qui prend le relais. Les salades, risotti et gâteaux maison attendent les heureux invités à ce banquet bon enfant, avant qu’ils ne rejoignent le froid brouillard qui enrobe Genève en cette nuit de mi-novembre. Le prochain rendez-vous, c’est le Comte Ory de Rossini, autre ouvrage sémillant pour accompagner les fêtes de fin d’année.

 

par Gilles Moîné-Charrassier

 

Grand-Théâtre de Genève, 16/11/2011, et 18, 20, 22, 25 et 27/11/2011

Jusqu’au 27/11/2011

http://www.geneveopera.com/home

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