25 février 2012
Paroles, paroles…

A comme Abécédaire. Le temps d’un alphabet pour revenir sur quelques unes des 374 promesses de campagne de Nicolas Sarkozy en 2007. Plus ou moins tenues, en cours, ou simplement tombées dans l’oubli.

B comme Banlieues. C’était pourtant l’une de ses « priorités du quinquennat ». Le « plan espoir » -une sorte de plan Marshall- pensé par Nicolas Sarkozy s’est réduit à une peau de chagrin.  « Je consacrerai beaucoup d’argent aux banlieues, dans l’éducation, la formation, la rénovation urbaine, les services publics, les transports, l’activité économique » lançait ce dernier en 2007. Mais le franc-parler de Fadela Amara, en charge du dossier et qui n’est d’ailleurs plus en poste au gouvernement, n’a rien pu changer en profondeur dans les quartiers. En 2009, Henri Guaino, conseiller spécial de l’Elysée, a reconnu que le plan Banlieue lancé par le chef de l’Etat n’avait « pas abouti ».

C comme Chômage. « Atteindre un taux inférieur à 5 % », fanfaronnait-il. Alors que le chômage flirte aujourd’hui autour des 9,8%, la situation serait presque cocasse tellement Nicolas Sarkozy semblait y croire. « Si on s’engage sur 5% et qu’à l’arrivée il y en a 10, c’est un échec. Et aux Français d’en tirer les conséquences ». Message reçu.

D comme Développement durable. Le vert, toujours vendeur. « Je créerai un grand ministère du Développement durable ». Chose dite, chose faite. La composition du ministère Fillon établie, le ministère de l’Écologie, du Développement durable a  fusionné avec celui des Transports et du Logement. Quant-à la fiscalité écologique, outre les bonus-malus et autres éco-prêts à taux zéro, en bon élève écolo – le Grenelle de l’Environnement, surmédiatisé, n’a été qu’un miroir aux alouettes dont les engagements annoncés en fanfares sont restés au panier. La taxe carbone a été renvoyée au niveau européen ; la taxe poids-lourds reportée à 2012 ; la taxe pique-nique (sur les couverts et assiettes jetables non recyclables) abandonnée.

E comme Ensemble tout devient possible. Un slogan en béton au départ. Ensemble ? Tout ? Possible ? Cela résonne plutôt maintenant comme la promesse d’un vieil amant jurant inlassablement de quitter sa femme pour sa maitresse. « La France au français » est plus d’actualité, alors que le Président courtise les voix du FN- parce qu’il ne faut pas jeter la pierre aux brebis égarées pour résumer les propos de Jean François Copé au micro de France Inter.

F comme famille. « Je soutiendrai fortement toutes les familles, sans a priori ». Et stigmatiser une famille dont les enfants sont en difficulté et sèchent les cours en leur supprimant les allocations familiales, loi existante mais jamais appliquée avant l’intervention de Nicolas Sarkozy. Un soutien incontestable largement prêché par Eric Ciotti –un des chiens de garde du Président œuvrant dans les Alpes-Maritimes. Le résultat : en dix mois 160 familles dans toute la France se sont vues supprimer les allocations familiales.

G comme Guy Môquet. Ou comment restaurer le patriotisme dès le plus jeune âge. Le Président souhaitait que la lettre d’adieu de ce jeune résistant communiste soit lue en début d’année dans les classes des lycées de France. Certains professeurs choisiront plutôt de citer Condorcet pour expliquer le symbole de la résistance : « Je préfère leur histoire plutôt que leur éloge ; car on ne doit aux morts que ce qui est utile aux vivants : la vérité et la justice. »

H comme hébergement d’urgence. Mais lesquels? Avec 133 000 SDF en 2011, le manque d’hébergements d’urgences est criant -estimé à 70 000.« Je réformerai l’hébergement d’urgence, pour qu’il soit digne et permette la réinsertion ». En 2009, la politique du « logement d’abord » est mise en place par le secrétaire d’Etat au Logement, Benoist Apparu. Elle fait prévaloir l’importance de trouver un logement pour les personnes en difficultés plutôt qu’un hébergement d’urgence. Pour dénoncer cette mesure, Xavier Emmanuelli, a démissionné de son poste de président du Samu social face à une situation « qui n’est plus gérable. »

I -on s’en doute- comme « impôts ». Sur ce point Nicolas Sarkozy a tenu sa promesse… pour certains. « Je n’augmenterai pas les impôts, mais au contraire ferai tout pour les baisser ». Et d’alléger l’ISF, remplacé par un barème à deux tranches pour 2012, il s’applique désormais aux patrimoines supérieurs ou égaux à 1,3 million d’euros, contre les 800.000 euros précédemment. Sans oublier, les autres –les revenus modestes- qui vont devoir se serrer encore plus la ceinture entre  la « TVA sociale » et la prochaine hausse de la TVA annoncée . La France des « héritiers » n’aura jamais été aussi bien servie.

J comme justice. Et aussi comme un mandat marqué par un malaise entre pouvoir et corps judiciaire. L’annonce de la suppression des juges d’instruction –les seuls garants d’une indépendance face à l’Etat, leur permettant de mettre à jour des affaires politico-financières, comme l’affaire Woerth-Bettencourt- a soulevé un véritable tollé. Tel que Nicolas Sarkozy a dû reculer. Il a tout de même réussi à introduire les jurés populaires en correctionnelle et à supprimer 400 tribunaux dans le cadre d’une restructuration du système judiciaire. Non sans peine – exaspérés les magistrats ont défilé en grand nombre dans la rue cette année.

K comme Kouchner et l’ouverture politique prônée par le candidat de 2007. Résultat : en 2010, seul Frédéric Mitterrand représente l’ouverture à gauche, alors que Martin Hirsh et Fadela Amara ont jeté l’éponge. Eric Besson me direz-vous ? L’homme a démontré qu’il était bien plus à droite que la moitié des ministres de la majorité.

L comme Logement. A une période où la question du logement est au cœur des débats,  la promesse de Sarkozy n’est pas tombée dans l’oreille de sourds. Ainsi, il annonçait « faciliter la location en supprimant l’obligation de caution et de dépôt de garantie ». Du jamais vu. Même si la création du Loca-Pass permet la réduction du dépôt de garantie, il s’avère difficile à obtenir. Celui qui a promis de ne plus laisser personne dormir dans la rue doit désormais faire face à « un problème majeur de la société ». Aujourd’hui, pas moins de 700.000 personnes sont privées de domicile personnel en France, selon le dernier rapport de la Fondation l’Abbé Pierre.

M comme Ministère. Si le Ministère de l’Immigration et de l’Identité nationale n’a pas fait long feu -mais a rallumé la flamme chez certains Lepénniste-, il reste l’une des promesses tenues par Nicolas Sarkozy. De sa création controversée et hyper-médiatisée à son enterrement en petite pompe, il aura donné lieu  à beaucoup de dérapages –plus ou moins contrôlés- et une question restée sans réponse :  « Qu’est-ce qu’être Français ? »

O comme On a quand même une promesse de tenue. Celle faite aux Arméniens (500 000 en France) et à.. Charles Aznavour en octobre 2010 sur la pénalisation du génocide arménien. Non sans créer des tensions avec la Turquie. Et même avec son ministre Alain Juppé – dévoilé dans le canard enchaîné- qui a dénoncé « une connerie sans nom intellectuellement, économiquement et diplomatiquement ».

P comme Pouvoir d’achat. Ce refrain on le connaît, il a tellement bien rythmé la campagne de 2007 qu’il a convaincu 53% des électeurs. Si le pouvoir d’achat « par unité de consommation » a progressé de 2,4% selon l’Insee, les Français ont du mal à le ressentir dans leur portefeuille. Et « le président de l’augmentation du pouvoir d’achat » se retrouve aujourd’hui avec 337.000 personnes supplémentaires passées sous le seuil de pauvreté. Son pack sur la loi TEPA (travail, emploi et pouvoir d’achat) lancé après son élection par Christine Lagarde, l’ex-ministre de l’Économie et des Finances, n’a pas été suffisant pour faire face à la crise.

R comme retraite. «  J’augmenterai de 25 % le minimum vieillesse, je revaloriserai les petites retraites et les pensions de réversion pour que ces retraités vivent mieux. Ces mesures seront financées grâce aux économies que j’obtiendrai en réformant les régimes spéciaux de retraite ». Oui, des réformes, il y en a eu. Si le discours de campagne de Sarkozy ne faisait pourtant  pas acte de la douloureuse réforme des retraites, la crise est passée par là entre temps.  En passant en force  le recul de l’âge légal du départ à la retraite de 60 à 62 ans, le Président a signé là l’une des plus mémorables batailles –contre la rue- de son mandat.

S comme Service minimum. Un autre cheval de bataille que le président sortant pourra ajouter à sa –courte- liste des promesses tenues. Insistant sur l’irresponsabilité de bloquer tout un pays lors de manifestations, Nicolas Sarkozy a instauré la loi sur la continuité du service public des transports terrestres en cas de grèves. Une réforme approuvée aujourd’hui par le candidat de gauche François Hollande.

T comme Travailler plus pour gagner plus. Symbolisé par la défiscalisation des heures supplémentaires, son bilan reste mitigé. Selon un rapport parlementaire dressé en 2011, la loi TEPA a coûté 4,5 milliards d’euros en moyenne par an, sans avoir guère d’effets sur le pouvoir d’achat. Entre les 2,6 millions de personnes au chômage et la suppressions de 32 000 emplois salariés au 4e trimestre 2011 -une première depuis 2009 au plus fort de la crise financière-, l’emploi est plus que jamais en crise.

U comme universités. Plus d’autonomie pour les universités. En 2007, le candidat du changement avait annoncé sa réforme sur l’enseignement supérieur. Quelques mois après son élection, c’est l’un des premiers grands chantiers qu’il lance. Malgré les grincements de dents des enseignants et les manifestations étudiantes, Valérie Pécresse a tenu bon, arborant fièrement sa loi LRU destinée à « dégraisser le mammouth » de Claude Allègre .

V comme vidéosurveillance. Entre Nice « capitale des caméras de surveillance » et Paris qui s’est dotée cette année de 180 caméras supplémentaires, le chef de l’État espère résoudre les problèmes d’insécurité. Depuis leur mise en service dans la capitale, 350 personnes ont été interpellées. D’ici l’été 2012, 1 000 autres caméras viendront renforcer la « vidéoprotection » de Paris.

Y comme Yacht . Il avait annoncé se retirer dans un monastère après son élection pour « réfléchir »; voilà qui s’est transformé  finalement en croisière sur le bateau de son ami Vincent Bolloré.

Par Sarah Vernhes

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