10 décembre 2011
A l’ombre des jeunes filles en cloque

C’était en 2008. A Gloucester High School, dans le Massachusetts, dix-sept filles ont décidé de tomber enceinte en même temps. Time magazine, sidéré par cette histoire, avait révélé l’affaire. Un drôle de fait divers; une matière éminemment romanesque, en tout cas, presque toute trouvée. Vanessa Schneider en a fait un roman « Le pacte des vierges », sortie à la rentrée dernière chez Stock. Delphine et Muriel Coulin, deux sœurs cinéastes, dont c’est plus ou moins le premier film, ont ensuite choisi de porter cette histoire à l’écran. Ou plutôt de se saisir de cette trame pour inventer leur propre scénario. Car de ces ados américaines, elles n’ont rien voulu savoir. Ni  leurs motivations, ni  leurs profils- ce n’était pas leur propos.

Un pacte utérin

Les réalisatrices ont donc délocalisé les jeunes filles à Lorient, ville où elles ont grandi et qui s’est bâtie sur les échanges maritimes, d’où ce nom, L’orient. Ces jeunes filles là s’y ennuient. Plombées par la perspective d’une vie étriquée. La même que celle de leurs parents, un peu moyenne. C’est du moins ce qu’elles pensent. Alors pour contrer cette grise destinée, surgit presque par hasard ce pacte utérin. Dix-sept ventres comme des étendards féministes, prétexte à une vaste utopie : elles élèveront leurs enfants ensemble, ils seront comme frères et sœurs, elles s’entraideront, vivront en communauté. Un rêve d’adolescentes, en somme. L’intention de Muriel et Delphine Coulin est donc bonne. Et leur trame de départ pleine de promesse. Elles savent filmer Lorient, l’océan, le port un peu sinistre. Elles captent avec une certaine justesse cette période qu’est l’adolescence d’une jeune fille : l’euphorie créée de toute pièce, ce besoin d’être ensemble, de partager, ce groupe en fusion, cette aliénation aussi par l’autre.

Malheureusement, cela ne suffit pas à faire un bon film et assez rapidement, le propos tourne à vide. Trop mince pour être étiré sur une heure et demi. Alors ça tire à la ligne… Et le film devient bavard. Un babillage adolescent un peu inconsistant plein de « c’est clair », et de « trop relou », qui sonnent bizarrement dans la bouche de ces ados qu’on aurait plus imaginé comme des Rosetta des frères Dardenne que comme des jeunes filles sorties de LOL . C’est là d’ailleurs, que réside le vrai problème du film. Delphine et Muriel Coulin racontent avoir vu 600 filles, la plupart castées à Lorient, avant de choisir les dix-sept bonnes. Charmantes, pétillantes et parfois bonnes actrices, on les croirait cependant sorties d’un lycée de Neuilly. Où, comme chacun sait, ce genre de faits divers ne court pas vraiment les rues.

Par Sarah Gandillot

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