20 décembre 2016
Roméo et Juliette, de la grâce

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Il aura fallu attendre plus de soixante ans pour que la Comédie Française ne redonne Roméo et Juliette de Shakespeare. La pièce romantique par excellence, celle de l’amour fou et pur et qui, forcement finit mal; « une course folle » comme le souligne Eric Ruf, nouvel administrateur du Français, qui en signe la mise en scène. Décors épurés- sublime jeu de murs où le temps a fait son oeuvre pour figurer une Vérone blafarde, où la chaleur « échauffe les esprits ». Pour Victor Hugo, Shakespeare,  c’était « l’Olympe et le théâtre de la foire » réunis. La traduction présentée ici tient d’ailleurs du grand homme puisqu’elle a été écrite par son fils François-Victor Hugo qui a traduit l’oeuvre complète de Shakespeare entre 1859 et 1866. Autant dire qu’elle est brillante, comme ces deux amoureux aux « étoiles contraires ». Voilà donc Roméo, en chemise blanche et pantalon noir face à Juliette, tantôt en nuisette, tantôt ressemblant à Audrey Hepburn dans Breakfast at Tiffany, Christian Lacroix signant une fois encore des costumes plus qu’inspirés. Suliane Brahim lui prête ses traits ravissants et son jeu frais et irrésistible-elle qui craignait chaque année passant qu’elle ne dépasse l’âge du rôle- minaudant avec grâce ou rageant contre son meurtrier d’amant « corbeau aux plumes de colombe, agneau vorace comme un loup ». Ces deux-là s’aiment furieusement, passionnément mais devront le payer de leur vie, Juliette, après avoir été transformée en « cadavre vivant » par son père qui l’oblige à se marier à un autre dans une scène d’une violence verbale inouïe, « Pute », jouée par un Didier Sandre impressionnant de modernité; et Roméo, condamné à l’exil. Un tombeau avec des sarcophages les réunira à nouveau, achevant leur quatre jours de passion. Et mettant un terme à cette pièce d’une beauté infinie, servie par une troupe comme toujours éblouissante- Danièle Lebrun en « Femme », Laurent Laffite en Benvolio et Jeremy Lopez jouant Roméo, amoureux bondissant que « la beauté de Juliette (m’)a rendu efféminé ». La pièce ici jouée vous rendra quant à elle simplement heureux.

LM

Roméo et Juliette, Salle Richelieu de la Comédies Française jusqu’au 30 mai 2016

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