12 décembre 2015
Redford, un seigneur à l’Unesco

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Ce n’est pas dans les allées de la COP21 que Robert Redford, écologiste s’il en est et cela de la première heure, s’est exprimé en cette quinzaine du climat en France. Non, le réalisateur d’Ordinary people ou de Lions and Lambs, éternel Jeremiah Johnson ou Finch Hatton de Out of Africa  grâce à Sydney Pollack, avait choisit la belle salle de l’Unesco dimanche dernier pour venir soutenir l’ONG Natural Resources Defense Council à laquelle il est fidèle depuis 1977. Créée par John Adams, cette organisation a eu l’intelligence de comprendre que les batailles se gagnent avant tout devant la justice, avec des avocats qui, associés à des scientifiques et des politiques, luttent en concert contre la déforestation, la pollution des mers et des rivières et l’extinction des espèces animales. Robert Redford n’est donc pas ici en invité « red carpet » mais en supporter de chaque instant, arrivant sous un tonnerre d’applaudissement sur la scène de l’Unesco; il en monte difficilement les quelques marches du haut (quoiqu’il assez petit en vrai) de ses 79 printemps, néanmoins flamboyants. « Pour que les gens soient touchés, il faut un message; lorsque les histoires sont finies, c’est lui seul qui demeure ».

Une seule planète

Le voilà devant l’assemblée, sa crinière de lion toujours aussi belle, son regard toujours aussi acéré, faisant rougir son intervieweuse lorsqu’il lui sourit. Toutes les femmes dans l’assemblée rêvent alors d’être à la place de cette asiatique impeccable qui l’écoute rappeler que « nous n’avons qu’une seule planète » et que nous vivons désormais « notre seule chance de la sauver ». Redford revient alors sur son histoire, sa naissance à Los Angeles où il y avait tant de champs, de jardins; « lorsque j’y suis revenu, je me suis dit que l’on m’avait enlevé ma maison ». Ce sera donc l’Utah, avec Sundance, une montagne où il créé une réserve en achetant toutes les terres avoisinantes, avant qu’un gigantesque projet de centrale électrique ne le pousse à s’engager. Nous sommes en 1975, Dan Rather, présentateur vedette,  le reçoit sur CBS et Redford parvient à faire capoter le projet. « J’ai reçu beaucoup de menaces, ma famille aussi, mais j’avais gagné pour que cette nature que jamais ne soit pas touchée ». Le Clean Air Act et le Clean Water Act suivront, avec ce constat désabusé que « personne ne vote pour une nouvelle idée » et qu’il n’existe pas de « solutions facile ni évidente » en matière d’écologie.

Pas un problème politique mais moral

L’Utah, mais aussi Paris où « je suis très content d’être venu », rappelant qu’il y fit ses études à 20 ans. La COP21? « C’est très technique, moi, je ne suis pas un politicien, je suis venu à l’écologie en prêtant attention aux indigènes; quand on voit ce qui risque d’arriver dans les Iles Marshall, c’est effrayant. Copenhague, Kyoto n’ont été que des mots, il faut avant tout des actes ». Redford s’interrompt pour regarder le film qui lui est consacré puis scande: « Il ne s’agit pas ici d’un problème politique mais d’un problème moral », ajoutant en riant que si on ne l’avait pas toujours pris au sérieux car il n’était qu’un « acteur », « avec l’élection de Ronald Reagan à la présidence des Etats-Unis, il a bien fallu que les gens changent d’avis! ».

Un militant qui reste une star, inapprochable par le public présent et que je n’ai pu aborder qu’à la faveur d’une ruse de Sioux- tout le monde le cherchait après son allocution, des rumeurs le disaient parti, d’autres caché dans la salle- pour lui remettre devant deux armoires à glace, un petit livre que je n’avais pu lui donner à Sundance: Antigone de Jean Anouilh, en anglais. Il me semblait qu’en matière d’indépendance-son leitmotiv- et d’engagement, il y trouverait son compte…

LM

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