30 avril 2013
La vérité par les tweets?

Il n’y a pas que la direction générale des impôts qui n’aime pas les chiffres ronds. Déclarer des revenus du genre 23 500 euros éveille les soupçons au point de risquer à coup sûr un contrôle fiscal. Voilà qui paraît également bien suspicieux aux agences de presse lorsqu’il s’agit d’un bilan humain. En annonçant par centaines de tweets que dans les faubourgs au sud de Damas à Jdeidet al Fadl samedi 20 avril, 450 personnes ont été massacrées par les forces de Bashar El Assad, il semblerait que cette information soit parue bien suspecte aux médias occidentaux malgré une vidéo sanglante dans laquelle des morceaux de corps humains étaient évacués à l’arrière d’un pick-up, ou le visage d’un enfant mort sur lequel quelqu’un a écrit au feutre bleu : « Assad et personne d’autre ». Le hashtag aux allures un peu trop marketing #mentionthe450   va alors enflammer la toile qui dénonce face à ce nouveau massacre le silence des médias classiques. Ainsi, seuls certains sites Internet, CNN, France 24, BBC ou le New-York Times feront état de violents combats en  utilisant le conditionnel quant au nombre des victimes et en prenant soin de prévenir leurs lecteurs qu’aucune source indépendante n’a pu confirmer le bilan.

Pas de source vérifiable

Faute de journalistes sur place, aucun média occidental ne dispose en effet de sources fiables ni d’ images dont la provenance est vérifiée dans un conflit où les vidéos tournées avec des téléphones portables circulent en boucle sur internet. Il faut dire qu’après Timisoara, aucun journaliste n’ignore plus que les images peuvent être manipulées comme ces récentes photographies « photoshopées » par la Corée du Nord afin de faire croire au reste du monde qu’elle détient une solide force armée. « Quand les gens sont désespérés, ils peuvent faire n’importe quoi » commente un journaliste français tandis que les Syriens réfugiés en France hurlent leur désespoir que l’on puisse imaginer que les vidéos des citoyens restés là-bas prêtent à discussion. Alors où se trouve la vérité? A ce jour, personne ne peut le dire. Une seule chose est sûre: avec internet, les règles du journalisme classique ont définitivement été modifiées.  Autre certitude, des civils continuent de mourir chaque jour en Syrie comme ce mardi où un attentat à la voiture piégée devant un centre commercial de Damas a fait 13 morts et 70 blessés tandis que selon Reporters sans frontières, sept journalistes sont actuellement portés disparus en Syrie, 23 autres ayant été tués depuis le début du conflit en mars 2011, de même qu’au moins 58 de ce que l’on appelle aujourd’hui des citoyens-journalistes dont internet est aujourd’hui l’unique relais.

Par Laetitia Monsacré

 

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