12 avril 2013

Avec le développement du tourisme, l’ensemble des musées européens ont dû se rénover pour accueillir comme il se doit les cohortes de visiteurs, avides de voir les chefs-d’oeuvre de pays à l’inestimable richesse patrimoniale. Alors pendant les travaux affectant les bâtiments, pas question de se priver de ces toiles, lesquelles trouvent désormais refuge dans d’autres lieux ou dans un espace « sauvegardé ». Ainsi, à Cracovie, c’est au Château de Wavel, édifice à la croisée du Moyen Age et de la Renaissance et situé sur une colline à l’entrée de la ville que l’on peut admirer La Dame à l’Hermine de Léonard de Vinci, pendant les travaux du Musée des princes Czartoryski. Acquise en 1798 par cette noble famille, cette petite toile sur bois qui est l’un des quatre seuls portraits réalisé par le célèbre peintre italien est passé par  l’hôtel Lambert à Paris puis fut saisi par les nazis en 1939. Représentant Cecilia Gallerani, la maîtresse de Ludovic Sforza, duc de Milan avec son animal de compagnie de l’époque, elle est tout comme la Joconde désormais sous verre mais bien moins cernée d’appareils photos que son illustre cousine du Louvre.

Tout beau, tout neuf

Cette stratégie de sauver de l’ombre des travaux les «  highlights » de la maison dont la célèbre Ronde de nuit de Rembrandt avait déjà été adoptée par le Rijkmuseum d’Amsterdam,  qui vient de rouvrir après dix ans et 375 millions d’euros de travaux pharaoniques en partie confiés à l’architecte français Jean François Wilmotte, entre autres pour se mettre aux normes.  Durant ce temps, seules 700 œuvres étaient visibles dans une partie de l’aile Philips de ce musée- vaisseau amiral de la culture néerlandaise qui retrouve ainsi cette semaine  près de 8 000 peintures et objets d’arts dans 80 pièces. Huit siècles de l’histoire de l’art hollandais et un million de références qui retrouvent toute leur splendeur des caves voûtées aux combles réservés au XXe siècle, avec également l’ajout très pragmatique d’un pavillon d’arts asiatiques… Avec vingt-cinq Rembrandt et quatre Vermeer, le Rikjmuseum devient donc le plus « neuf » des dix plus grands musées du monde avec une réorganisation générale des salles; seule La Ronde de nuit a retrouvé sa place initiale, d’où via une fente au sol, elle pourrait être évacuée rapidement en cas de problème de l’autel central de la nef néogothique laïque imaginée, en 1885, par l’architecte Pierre Cuypers. On n’est jamais trop prévoyant…

Des marines aux porcelaines de Delft

Avant de l’admirer au deuxième étage, le grand hall offre désormais au visiteur ses fresques XIXe, composées dans le style épique d’un Puvis de Chavannes, jusqu’alors recouvertes de peintures blanches (sic) avec un sol de marbre poncé et poli, à mosaïques de zodiaque; de là huit chapelles latérales dédiées aux géants du Siècle d’or: Hals et ses portraits de compagnies, Saenredam et ses géométries d’intérieurs d’églises, Ruisdael et ses paysages préromantiques, les marines de Cuyp, les portraits et autoportraits de Rembrandt puis l’autre chef-d’oeuvre du Musée,  La Laitière de Vermeer qui tient compagnie à La Femme en bleu lisant une lettre. A cela s’ajoutent maquettes de bateaux, réunies sur un seul socle en une formidable armada, précédant l’argenterie, l’orfèvrerie, les porcelaines de Delft ou de Chine dans une profusion maximale. Au total, 1,5 km de parcours sur quatre niveaux à partir des deux cours intérieures, devenues atriums à verrières, coupés par une voie centrale en surplomb, où continueront à passer les vélos malgré la polémique et l’espoir de doubler par deux la fréquentation du musée-deux millions de visiteurs attendus. Voilà qui valait bien la dernière sortie officielle de la reine Beatrix avant son abdication  d’un bâtiment que son arrière-grand-père avait refusé d’inaugurer, trouvant qu’il ressemblait à un couvent. Soyons sûrs qu’il sera plus fréquenté…

AW

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