31 janvier 2013
La peinture méditative de Fabienne Verdier

Après six ans de bons et loyaux services dans le paysage audiovisuel, la série Empreintes, avec 120 documentaires de 52 minutes diffusés sur France 5, vit ses derniers mois. Inégale, aux choix souvent étranges, elle a été l’occasion de portraits souvent magnifiques dès lors que l’artiste s’y prêtait…Erik Orsenna, Michel Bouquet, Stéphane Hessel, Soeur Emmanuel, Amélie Nothomb, Annette Messager, Philippe Djian, Karl Lagerfeld ou Vincent Lindon (tous deux du formidable portraitiste Thierry Demaizière), musiciens, écrivains, acteurs ou peintres, mais également patrons (là ça s’est gâté) se sont laissés suivre pour se livrer sur cette « empreinte » qu’ils laisseraient derrière eux. Eux qui avaient réussi à faire de leur vie quelque chose de plus brillant que les autres…

Diffusée avant Daniel Auteuil – malheureusement très plat- l‘Empreinte de Fabienne Verdier nous fait découvrir cette artiste peintre exposée dans la plupart des grands musées d’art contemporain comme le centre Pompidou, et pourtant inconnue du grand public. Initiée à l’art de la calligraphie par les maîtres chinois dans une Chine qui sortait tout juste de la révolution culturelle, elle est l’apôtre du spontané: « on y va » , puis l’instant d’après « on détruit ». Il faut la voir manier son guidon de vélo relié à un filin qu’elle pilote au-dessus d’une grande toile, avec au bout un pinceau géant gorgé de peinture qui fait plus de 70 kilos…« C’est une vie de travail pour arriver à cela » dit-elle, le pantalon couvert de peinture, et le visage anguleux avec, son nez qui suit un tracé quelque peu dévié. Tout comme sa trajectoire à elle,  choisissant de vivre si longtemps en Chine, et ayant failli mourir, ne pesant plus que 30 kilos jusqu’à connaître « l’éveil ». « Quand je peins un arbre, je suis l’arbre ». Et comme » la vie est une transformation incessante », sans cesse elle essaye de transmettre à son  pinceau « l’élan vital » avec l’ aide de carnets de notes et de pinceaux ramenés de Chine, « ils vont m’aider »– poils de chats, moutons et autres animaux mélangés ou encore crins de cheval- » de mâles uniquement car chez les  juments, le crin est abîmé par l’acidité de l’urine ». L’aider à capter « la mélodie dans l’espace, la  fluidité du réel » afin de parvenir à ces grands formats entre Henri Michaux et Soulages, et qui plaisent tant aux collectionneurs d’art abstrait. On découvre ainsi dans ce portrait sur fond de musiques de bols tibétains ou de violoncelles un mécène bien  loin de l’image du riche qui s’offre de l’ art car il a tout le reste. Non pour ce Suisse, c’est  l’art dans sa plus pure et noble expression qui est mis à l’honneur dans sa fondation qui associe avec bonheur Yves Klein, Cy Twombly, de Kooning ou Richard Serra.

« Laisser rêver les lignes » disait Paul Klee. Comme celles des vagues en hommage à Hokusaï,  ou aux  primitifs flamands, Vlaminck ou Van Eyck, qui ont inspiré Fabienne Verdier des toiles qu’elle va exposer à partir du 4 mai au Musée Groeninge de Bruges;  des tableaux dont vous pourrez découvrir l’ébauche à la fin de ce très beau film de Mark Kidel, qui vous plongera au coeur de la création artistique et dans un état méditatif bienvenu pour un vendredi soir…

AW

Empreintes-Fabienne Verdier sur France 5 le vendredi 1er février à 21h 30 à revoir sur pluzz

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